Résumé : Taos relate à M'hamed la véritable version des faits. On était à la mi-journée, lorsque le jeune homme la quitte. Les enfants et Meriem arrivèrent pour le déjeuner. Cette dernière recommande à sa belle-mère de se reposer davantage. Taos somnole quelques minutes, puis se lève. Elle savait que désormais ni ses nuits ni ses journées ne seront de tout repos. Maintenant qu'elle connaissait toute la réalité dans l'affaire du jeune M'hamed, elle ne saurait trouver la quiétude. Pourtant, il faut bien qu'elle la trouve cette quiétude. Il faut bien que Meriem sache que son fils, qu'elle croyait mort, est bien vivant et est devenu un bel homme, qui s'apprêtait à décrocher un diplôme d'études supérieures et à entrer dans la vie active. La vieille femme se met à marcher à travers l'appartement sans but précis. Son cœur saignait, son esprit s'embrouillait. Elle tente de voir clair dans ce labyrinthe de contradictions qui malmenait sa conscience. Elle avait compris aussi que ce signe du destin n'était pas fortuit. M'hamed devait retrouver sa véritable mère, et cette dernière devait retrouver son fils. Le jeu était donc clair. Reste à trouver comment et quand entamer la partie. Taos prend une lente inspiration. Une migraine s'était manifestée et un vertige menaçait de l'engloutir. Elle se dirige vers la cuisine et se prépare un café qu'elle se met à boire à petites gorgées. Le goût amer de la boisson ajoutait sa note dans tout son être. Elle pose sa tasse et se verse un verre d'eau. La maison était plongée dans le calme et la pénombre. Pour lui permettre de se détendre, Meriem avait fermé toutes les fenêtres et tiré les rideaux. Pourtant, cette atmosphère censée la déstresser ne faisait qu'augmenter son désarroi. Elle avait plutôt envie de voir la lumière du jour, comme si dans cette dernière elle allait trouver la solution tant convoitée. Un peu déroutée dans ses pensées, elle rejoint sa chambre et se rallonge sur son lit. On était déjà au milieu de l'après-midi et les enfants n'allaient pas tarder à rentrer. Elle soupire. M'hamed lui avait promis de ne plus jamais les importuner. Maintenant il connaissait tout sur la famille, et avait même changé son opinion envers sa mère. Elle soupire encore. Il fallait que Tahar et Yamina entament le sujet, un jour où il se trouvait à la maison. Elle secoue la tête. C'était écrit. Ce qui est écrit, personne ne peut le changer. Nous ne sommes que des marionnettes dans un théâtre qui s'appelle "la vie". Le bruit de la porte d'entrée la tire de ses méditations. Elle se lève pour accueillir ses petits-enfants et leur proposer un goûter. Kamel et Malek sont heureux de retrouver leur grand-mère et la suivent docilement dans la cuisine pour s'attabler. Elle leur sert de grands bols de chocolat chaud et des biscuits qu'ils engloutirent sans attendre, avant de se retirer dans leur chambre. Meriem arrive quelques minutes plus tard. Elle constate que malgré ses recommandations, sa belle-mère s'était levée et s'était occupée des enfants, avant de s'attaquer au dîner. -Tu es incorrigible yemma Taos, lance-t-elle d'un air las. La vieille femme ébauche un sourire : -Je crois qu'à mon âge, il est trop tard pour y remédier. -Voyons, tu es aussi pâle qu'un citron. Pourquoi n'écoutes-tu pas mes conseils pour aller te reposer ?! Et puis laisse donc ces légumes. C'est moi qui vais m'occuper du dîner. -Non. C'est déjà fait. Je n'ai plus qu'à mettre la marmite sur le feu. Meriem lui arrache le couteau des mains et l'exhorte à s'asseoir : -Là ! Tu vas m'écouter maintenant : je suis rentrée plus tôt qu'à mes habitudes afin de t'éviter cette corvée. Je devrais te surveiller davantage ou embaucher quelqu'un pour le faire. Dès que j'ai le dos tourné, tu t'amuses à préparer à manger ou à faire le ménage. Taos fait la moue : -Meriem, ma fille, tu comprends bien que je m'ennuies à ne rien faire à longueur de journée. Je suis seule à la maison, et hormis les quelques courses que je fais le matin, je n'ai pratiquement plus grand-chose à faire. Pourquoi m'empêches-tu de préparer ces plats traditionnels dont tout le monde raffole ? (À suivre) Y. H.