Au total 56 rescapés sont toujours hospitalisés aux UMC d'Oran. Hier matin, le service des UMC d'Oran connaissait une activité inhabituelle, avec un va-et-vient d'officiels et des services de sécurité ainsi que des journalistes venus recueillir le témoignage des 26 immigrés clandestins, rescapés d'une mort horrible alors qu'ils ont pu être secourus, ce vendredi, par les gardes-côtes algériens (voir notre édition du samedi 26 février). Sur place alors que les rescapés d'origine africaine et du Bangladesh sont pris en charge médicalement, répartis dans plusieurs salles, nous avons reçu la confirmation qu'en plus de ce groupe de 26 clandestins, les gardes-côtes algériens, relevant du commandement de la façade maritime ouest, ont, toujours dans la journée de vendredi, porté secours à 30 autres clandestins marocains cette fois-ci, et dont l'embarcation avait été retrouvée dérivant à quelque 12 km au large du cap Blanc, c'est-à-dire à proximité d'Arzew. Sur place, nous avons trouvé des hommes jeunes ne dépassant pas les 24 ans pour la plupart d'entre eux, installés sur des matelas à même le sol, nous avons pu brièvement parler avec eux, étant donné leur état d'extrême fatigue, certains étant toujours sous perfusion. Se gardant de donner des détails sur leur pénible périple, ces clandestins marocains nous ont tout de même raconté qu'ils avaient pris la mer samedi dernier en espérant rejoindre les côtes espagnoles. C'est à partir de Houceina qu'ils auraient embarqué à 65 dans une frêle embarcation avec à bord des effets vestimentaires et un peu de nourriture. Mais la violence des vagues et des vents qui frappaient la Méditerranée a malmené leur embarcation : “Nous avons jeté nos affaires par-dessus bord, les vagues étaient très hautes, plusieurs sont morts, tombés par-dessus bord ou n'ayant pas résisté… Il ne reste que nous en tout…”, nous confie un jeune Marocain qui explique encore que c'est depuis 7 jours qu'ils sont en mer à la dérive. Un autre de ces rescapés avouera que c'était là sa première tentative de passer en Espagne clandestinement, mais que plus jamais de sa vie il ne tentera la mort de cette façon… affirme-t-il encore. Plus loin, ses autres compagnons d'infortune avoueront avoir payé 11 millions, l'équivalent de leur monnaie en dirham pour ce passage vers l'eldorado européen. En milieu de matinée, le consul général du Maroc s'est rendu au chevet des rescapés pour s'enquérir de leur état. Ce dernier nous a déclaré qu'il s'agissait là d'une situation dramatique et malheureuse “vous voyez qu'ils sont jeunes pour la plupart, ils sont attirés par l'image des pays européens …”, et de poursuivre “nous remercions les autorités algériennes, les gardes-côtes, les pompiers et les médecins qui sont intervenus pour les secourir…” Quant aux 26 autres rescapés originaires du Bangladesh et de l'Afrique noire, ils sont également toujours pris en charge au niveau des UMC. Selon des sources médicales, il s'agit pour tous ces clandestins de cas de fatigue, de déshydratation et d'hypothermie : “Vendredi soir lorsqu'ils ont été amenés à notre service, nous avons dû faire face à une situation vraiment exceptionnelle pour les prendre en charge rapidement, dégager des salles et des lits pour les accueillir car ils étaient dans un état sanitaire pas très bon et très faibles…”, nous explique un médecin. Les services de sécurité étaient également au chevet de tous ces clandestins afin d'établir leur identité et de tenter de retracer leur itinéraire. Des faits qui souvent sont pris avec les précautions d'usage par les représentants des autorités algériennes. Une fois de plus ce drame terrible des clandestins prouve l'existence de réseaux qui organisent et assurent des filières de passage à partir du Maghreb pour les immigrés clandestins venant de pays aussi divers qu'éloignés comme le Bangladash, le Mali, la Guinée-Bissau… Dans les jours à venir, l'ensemble de ces clandestins feront l'objet de procédures d'expulsion vers leur pays d'origine ? F. B.