Résumé : El-Hadj Mokhtar est agréablement surpris par son fils qui lui annonce que Nadjette et lui veulent se marier et s'installer définitivement au village. Il est si heureux qu'il annonce la nouvelle à son épouse le soir même. Prenant une lente inspiration, il poursuit : - De ce pas, je consens à lui léguer une parcelle des terres sur laquelle il construira une maison moderne, et je l'y aiderai de mon mieux. En attendant, je vais m'occuper des formalités administratives afin que Nadjette puisse ouvrir le plus tôt possible un cabinet de vétérinaire. Ma future belle-fille pourra aussi utiliser l'écurie pour ses expériences. Khadoudj, bénissons ces enfants et remercions Dieu pour Sa clémence et le bonheur qu'Il nous accorde. Muette de surprise, Nadjette lance un coup d'œil à Athmane qui presse davantage sa main, puis à son futur beau-père qui ébauche un sourire. Mais la vieille Khadoudj vint mettre de l'eau dans son moulin. - Jamais !, s'écrie-t-elle. Jamais de ma vie je n'accepterai ce mariage. Ne vois-tu pas que cette fille n'a qu'une seule idée en tête, Mokhtar. Celle d'accaparer notre fils et nos biens ! Mais ouvrez donc vos yeux pour voir un peu plus clair. El-Hadj Mokhtar fronce les sourcils et toise sa femme. - Khadoudj ! Pourquoi t'acharnes-tu sur cette fille ? Que t'a-t-elle donc fait ? Ne vois-tu pas que c'est elle la femme que notre fils a choisie pour en faire la compagne de sa vie ? Pourquoi veux-tu les empêcher d'être heureux ? - Je veux empêcher plutôt mon fils d'être malheureux. Athmane juge opportun d'intervenir. - Mère. J'aime Nadjette, et elle me le rend bien. Je ne veux pas renier une fille qui m'a aidé dans les moments difficiles et qui a partagé mes joies et mes peines. Je ne veux que ta bénédiction, mère. Sois raisonnable. - Ma bénédiction ? Eh bien, tu ne l'auras jamais ! - Femme !, s'écrie le vieux Mokhtar. Pourquoi veux-tu entraver le bonheur de ces enfants ? Ne trouves-tu pas que tu exagères dans ton jugement ? Où veux-tu en venir avec tes arguments qui ne valent absolument rien devant leur décision ? - Je n'ai nulle envie d'être la risée de tout le village en introduisant chez moi un garçon manqué. Cette fille s'habille comme un homme, se coiffe comme un homme et travaille comme un homme. - Pourquoi comme un homme ? Cette fille s'habille selon son époque, et est libre dans son comportement, auquel d'ailleurs je ne trouve rien à redire. Quant à son travail, tu dois reconnaître que c'est les femmes qui s'occupent le plus souvent du bétail chez nous. Ne disais-tu pas que tu avais hérité de nos aïeux des recettes pour soigner les bêtes et que c'est toi-même qui t'occupais de la vache noire et du coq blessé ? Nadjette est vétérinaire. C'est-à-dire qu'elle a fait des études et appris dans les livres ce que toi tu as appris sur le tas. Elle aime les animaux et veut aider les paysans du village dans l'entretien de leur bétail. Tu devrais plutôt en être fière. Pour toute réponse, la vieille Khadoudj se lève et quitte la pièce. Mokhtar la suit, et le jeune couple se retrouve seul. - Viens, Nadjette. Mettons-nous plus près du feu, le temps se rafraîchit. (À suivre) Y. H.