L'affaissement de terrain, survenu vendredi soir, à Ben Aknoun, sur l'axe autoroutier Zéralda-Dar El-Beïda, a provoqué un profond et large cratère, rendant la circulation impossible. Sur les lieux, dès la survenue du drame, l'on s'interrogeait s'il s'agissait d'une catastrophe naturelle ou d'une conséquence d'un certain laisser-aller. Retour sur un sinistre qui aurait pu tourner à la catastrophe. Alger a effleuré l'hécatombe, vendredi soir, lorsque, brusquement, la chaussée s'est affaissée, au niveau de Ben Aknoun, sur l'autoroute Zéralda-Dar El-Beïda, provoquant un profond et large cratère dans lequel ont chuté cinq véhicules. Il était environ 21h et, à pareille heure, un vendredi de surcroît, la circulation était fluide et les véhicules étaient peu nombreux à emprunter cet axe. Au niveau du grand virage de la rocade sud, tout près de la bretelle menant vers le complexe sportif Mohamed-Boudiaf et à la résidence Sahraoui, la terre s'ouvre brusquement. Les véhicules en provenance de Zéralda roulaient à vive allure à la faveur d'un trafic peu dense. Leurs conducteurs pris de court, les premières voitures arrivées à l'endroit chutent dans un cratère d'une profondeur estimée, selon les premiers éléments de l'enquête, à 8 mètres et d'une largeur de 6 mètres. Au total, 5 véhicules — une Peugeot Partner, une Renault Clio VI, une Polo, une Suzuki Alto et une Peugeot 301— sont tombés, les uns sur les autres, dans cet immense trou. Le bilan de la Protection civile fait état de 11 blessés, dont une vieille dame et un enfant de 4 ans. Le bilan sera porté à 14 personnes évacuées vers les hôpitaux de de Ben Aknoun, de Birtraria, d'El-Harrach et de Beni Messous, où ils sont gardés sous surveillance médicale selon la gravité de leurs blessures, pour certains, et de l'état de choc émotionnel pour d'autres. "Je n'ai rien ressenti. Il n'y avait aucune vibration. J'étais au balcon quand j'ai entendu des klaxons de voitures. La circulation s'est interrompue d'un seul coup. Les sirènes de la police retentissent de partout. Je croyais qu'il s'agissait d'un accident de la route, car ce virage est très dangereux. Je suis descendu en courant. Quand je suis arrivé sur les lieux, j'ai vu un énorme trou et des véhicules entassés dedans", témoigne un résident de Ben Aknoun. "On était les premiers à arriver sur les lieux car nous avons, à quelques encablures du lieu du sinistre, un point de contrôle qui nous a alertés. Je n'en croyais pas mes yeux. On a immédiatement donné l'alerte et nous avons bloqué la circulation routière pour sécuriser les automobilistes et parer à d'autres sinistres", a affirmé à Liberté le chef de la sûreté de daïra de Draria, Ramdane Louni. Le plan Orsec enclenché par le wali d'Alger, des centaines de policiers, de gendarmes et de sapeurs-pompiers arrivent sur les lieux. Des unités antiémeutes sont même été mobilisées pour empêcher les centaines de curieux accourus de s'approcher du lieu du sinistre. À notre arrivée sur les lieux, le constat est lamentable. La chaussée est fissurée à plusieurs endroits. Priorité à un plan de déviation À 22h, le wali d'Alger arrive accompagné du DG de la Protection civile, Mustapha El-Habiri, du chef de la Sûreté de la wilaya, Noureddine Berrachedi, et du commandant du groupement de la Gendarmerie nationale, Smaïl Serhoud. Priorité au plan de circulation. Les services de sécurité ferment tous les accès menant vers l'autoroute de Ben Aknoun. Dans le secteur relevant de la Gendarmerie nationale, le responsable de l'escadron de la sécurité routière (ESR-GN) de Zéralda, Rachid Bendali, explique : "Concernant les déviations, nous informons l'ensemble des usagers en provenance de Tipasa qu'ils peuvent se rendre à l'aéroport d'Alger en empruntant la nouvelle rocade sud d'Alger. Ainsi, ils peuvent passer par Douéra, Baba Hassan et Ouled Fayet. Dans l'autre sens, en allant vers Zéralda, ils peuvent emprunter l'autoroute Est-Ouest, ou alors le front de mer. S'ils sont contraints de venir par les hauteurs d'Alger, il est conseillé de passer par Dély Ibrahim, Beni Messous, Chéraga et Bouchaoui avant de dévier vers l'autoroute. Toutes ces informations sont disponibles sur le site Tariki.dz." Concernant le secteur relevant de la Sûreté nationale, Hamid Touat, responsable du Service de la sécurité publique (SSP) à Draria, conseille les usagers de la route d'"éviter cet axe autoroutier quel que soit le prétexte. Ainsi, pour sortir de Draria, il est conseillé de passer par le complexe du 5-Juillet, Chéraga, la route de l'ancienne briqueterie, Baba Hassan, l'axe des Deux-Bassins de Ben Aknoun. Cela dit, les usagers peuvent avoir gratuitement toutes les infos utiles en appelant le 15-48. Aussi, nous conseillons les automobilistes, pour la journée de dimanche (aujourd'hui-ndlr), de sortir plus tôt que d'habitude". En attendant l'enquête, la terre craque encore Il est 22h30, des engins sont mobilisés pour l'extraction des véhicules. Comme première étape, des poclains cassent ce qui restait de la chaussée pour se frayer un chemin. La terre vibre. Les craquements du sol se font entendre et les fissures sont visibles à l'œil nu sur un périmètre de 150 mètres sur ce virage incliné, en forme de "S". Il aura fallu plus d'une heure pour extraire les 5 véhicules pris au piège. À chaque fois que l'engin avance, la terre s'effrite et les hommes mobilisés sont contraints de décaper le bitume et de creuser pour avancer. Les curieux, nombreux à prendre des photos et des vidéos, lancent des hourrah, comme dans un stade de football et non sur les lieux d'une catastrophe. Difficilement extraits, les véhicules sont hors d'usage, voire totalement réformés. Le wali d'Alger, Abdelkader Zoukh, va dans tous les sens. Il cherche à comprendre ce qui s'est passé. S'agit-il d'une catastrophe naturelle ou d'un sinistre provoqué par quelque négligence ? Seule l'exploration du sol par des experts en géologie pourrait répondre à une telle interrogation. Pour le moment, il faut savoir que plusieurs fuites d'eau ont été enregistrées en moins d'une année sur les lieux du sinistre. Autrement dit, l'affaissement du terrain était, certes, prévisible, mais sans doute pas dans ces proportions. Aussi, l'inclinaison de la route et les fissures constatées n'ont apparemment pas été "prises au sérieux" pour parer à cette éventualité. Une chose est sûre : les travaux de réfection ont débuté dans la nuit de vendredi à samedi pour tenter de colmater ce cratère, mais il est peu probable que la circulation routière soit rétablie en moins de 48 heures. Raison pour laquelle M. Louni a appelé les automobilistes "à réduire les déplacements inutiles et à comprendre la situation, en attendant le retour à la normale". Minuit passé, les travaux de déblaiement commencent. Hier matin, de longs embouteillages se sont formés obligeant les habitants à garer leurs véhicules "quelque part" et à... marcher. F. B.