Un peu plus d'un mois après le sanglant attentat qui a coûté la vie à Rafik Hariri, la capitale libanaise est à nouveau secouée par une l'explosion d'une voiture piégée. L'inquiétude commence à gagner les Libanais, qui redoutent un retour aux années noires de la guerre civile, où le terrorisme a fait des ravages. Le nouvel attentat à la voiture piégée commis hier à Beyrouth, replonge le pays dans la peur. Cette fois-ci, les commanditaires ont visé la banlieue chrétienne. La déflagration a eu lieu juste après minuit dans le quartier de Jedeidé. Si les pertes humaines sont minimes, onze blessés seulement, en raison de l'heure tardive de l'explosion, il n'en demeure pas moins que les dégâts matériels sont considérables. En effet, plusieurs immeubles environnants ont été endommagés, alors que de nombreuses voitures en stationnement ont été détruites. Réveillés par l'assourdissante déflagration entendue au centre même de la capitale libanaise, beaucoup d'habitants sont descendus dans la rue. Cet attentat constitue le premier incident sérieux depuis l'attentat contre l'ancien chef de gouvernement libanais, Rafik Hariri, qui avait provoqué une onde de choc dans le pays. Il avait conduit au début du retrait de l'armée syrienne du Liban, sur fond de pressions internationales contre Damas et de manifestations pacifiques pro et anti-syriennes. Cette nouvelle attaque terroriste survient alors que la Syrie, maître du jeu au Liban depuis 30 ans, a achevé jeudi la première phase du retrait de son armée du pays du Cèdre. Entre 4 000 et 5 000 soldats syriens ont totalement évacué le Liban, quelque 10 000 se trouvant désormais repliés dans la plaine orientale de la Bekaa, frontalière avec la Syrie. Même les services de renseignements militaires syriens, très redoutés, ont également évacué leurs permanences des régions de Beyrouth, du Nord-Liban et de la montagne du Mont-Liban. L'objectif recherché à travers ce troisième attentat terroriste est évidemment de semer la terreur au sein de la population. Pour rappel, le premier attentat avait visé en octobre dernier le député de l'opposition Marwane Hamadé. Ceci étant, le choix du lieu, un quartier résidentiel, ne laisse aucun doute sur les intentions de ses auteurs. Devant cette situation de peur, le président libanais a immédiatement réagi, hier, en lançant un appel urgent à l'opposition et aux pro-syriens pour l'entame rapide d'un dialogue. “Vu les circonstances exceptionnelles que traverse notre pays, j'appelle solennellement l'opposition et le groupement d'Aïn Tiné (les partis prosyriens) à engager un dialogue pour sauvegarder le Liban”, a déclaré Emile Lahoud. “Les deux parties devraient dépasser leurs différends et ne tenir compte que de l'intérêt national en mettant fin aux polémiques, même dans les médias, car cela contribue à accroître la tension au sein de la population”, a ajouté le chef de l'Etat libanais. En attendant, l'opposition, qui a le vent en poupe et qui bénéficie d'un très fort soutien populaire, a écarté définitivement toute participation au gouvernement avant d'obtenir satisfaction. Les demandes se multiplient pour exiger la démission du chef de l'Etat, Emile Lahoud. Joumblatt prédit d'autres attentats Le principal chef de l'opposition libanaise, Walid Joumblatt, a réagi, samedi dernier, à l'explosion qui a blessé 11 personnes dans la banlieue de Beyrouth en affirmant qu'il y aura d'autres attentats tant que l'appareil sécuritaire libanais mis en place par la Syrie n'est pas démantelé.“Il y aura d'autres attentats et d'autres assassinats politiques si les chefs des services de renseignements et, à leur tête le président Emile Lahoud, ne sont pas limogés”, a-t-il déclaré devant ses partisans dans des propos rapportés par les télévisions libanaises. M. Joumblatt a réitéré son appel à la démission de M. Lahoud avant les élections législatives prévues en mai. Le chef de l'Etat avait auparavant appelé à un dialogue national entre l'opposition et le camp pro-syrien “pour sauver le Liban”. K. A.