Les étudiants, en dépit des pressions et du pourrissement recherché par les pouvoirs publics, restent solidaires. Le sit-in de protestation, dans la matinée d'hier, devant la faculté de médecine d'Oran, des étudiants de médecine dentaire, s'est transformé en une véritable célébration de la solidarité estudiantine, allant bien au-delà du cas des étudiants grévistes depuis 3 mois et ayant atteint le 6e jour de grève de la faim pour 15 de leurs camarades. Et pour cause, en répondant à l'appel à la solidarité avec les grévistes, des centaines d'étudiants ont afflué vers les lieux, à partir de 10h, venant de plusieurs facultés à l'image des étudiants en pharmacie, aussi en grève, ceux de l'Institut de maintenance et de sécurité industrielle (ex-IAP), qui bouclent un mois et demi de grève, et d'autres venant du campus de l'Usto. L'arrivée des étudiants en pharmacie, en rangs serrés, derrière une grande banderole, est accueillie par des applaudissements, des cris et l'on entend fuser de la foule "Solidaires, solidaires !... Etudiants solidaires !..." À peine la jonction faite, c'était au tour des étudiants de maintenance et sécurité industrielle, qui ont marché depuis le campus à Es Senia, de se joindre à la manifestation. Là encore, fortes et chaleureuses retrouvailles entre tous ces étudiants mus par un seul élan : se faire entendre et ne pas céder aux pressions. Les slogans vantant et célébrant cette solidarité ne cessent de monter en puissance et, à cet instant, des centaines de voix reprennent sans interruption "Ni soumission ni retour en arrière", "Les étudiants sont dans la rue, donnez-nous nos droits", "Ministère honte, honte...", "Donnez-nous un avenir". L'accès à la faculté est totalement bloqué, la rue envahie, les automobilistes obligés de faire demi-tour, ne pouvant se frayer un passage. Certains d'entre eux, pas rancuniers, klaxonnent en guise de soutien aux jeunes. Au loin, on aperçoit les fourgons de police tentant de se faire discrets, alors que d'autres, en civil, filment les étudiants. Mais ces derniers n'en ont cure et filment eux-mêmes leur "manif" qui est diffusée en direct sur les réseaux sociaux. Pendant plus de deux heures, et ne voulant rien lâcher, les centaines d'étudiants restent massées devant la faculté, brandissant leurs banderoles et reprenant leurs slogans, infatigablement. À un moment, la foule s'écarte pour laisser passer une ambulance du Chuo. Quelques instants avant le rassemblement, deux étudiants grévistes de la faim ont dû être évacués vers les urgences, provoquant l'émoi chez leurs camarades. L'un d'entre eux, un jeune de 22 ans, inquiétait particulièrement avec un pic de tension à 21 tandis qu'une autre gréviste avait vu sa glycémie chuter brutalement. Les délégués des étudiants en médecine dentaire tiennent à réagir et ciblent avec colère l'administration de la faculté, mais également les tutelles. "Vous avez là des responsables dans la faculté qui ne font rien et qui laissent des étudiants mourir à petit feu. Au lieu d'être à leur côté, ils font pression sur nous." "Nous n'abandonnerons pas, nos revendications sont légitimes, nous irons jusqu'au bout et chaque étudiant qui ne peut plus suivre la grève de la faim est aussitôt remplacé par un autre", affirme notre interlocuteur. Dans leur ensemble, les étudiants, en dépit des pressions et du pourrissement recherché par les pouvoirs publics, restent solidaires entre eux et derrière leurs délégués. D'ailleurs, au moment de mettre fin au rassemblement, nous apprenons que les membres de la coordination des étudiants ont été conviés à une rencontre aujourd'hui avec les trois ministères concernés. Un début de dialogue pour désamorcer une crise qui va en s'aggravant. D. LOUKIL