"Le FLN perd de sa crédibilité et il n'est pas question d'aller aux élections locales et encore moins à la présidentielle de 2019 avec Ould Abbes", tonne le redresseur Abdelkrim Abada. Nouvelle salve des redresseurs contre le secrétaire général du FLN, Djamel Ould Abbes. Passée l'épreuve des élections, deux porte-étendards de la contestation au sein du parti, Abdelkrim Abada et Abderrahmane Belayat, confinés jusque-là dans un silence sans doute calculé, reviennent à la charge pour réclamer rien de moins que la tête de celui qui n'entreprend rien sans attribuer la paternité de son action au président Bouteflika. "Nous avons fait appel au président de la République qui n'est autre que le président du FLN, afin qu'il puisse intervenir. Il faut évincer Djamel Ould Abbes. Il faut nommer un nouveau secrétaire général", réclame Abdelkrim Abada, l'une des figures du mouvement de redressement du parti. Favorable à la mise en place d'un comité de transition et à la tenue d'un congrès extraordinaire, Abdelkrim Abada plaide pour l'émergence d'une nouvelle figure à la tête de l'ex-parti unique et dont le pedigree ne doit souffrir d'aucune remise en cause, ni contestation. "Il faut quelqu'un de clean, avec un bon CV, qui connaît le parti et qui n'a pas d'antécédents judiciaires, un homme honnête et qui comprend les valeurs de ce parti. Nous en avons marre des Belkhadem, Saâdani et Ould Abbes, il est grand temps de redonner son lustre d'antan au FLN", affirme Abada dans des propos cités par TSA. "Le FLN perd de sa crédibilité et il n'est pas question d'aller aux élections locales, et encore moins à la présidentielle de 2019 avec Ould Abbes", ajoute-t-il, suggérant en filigrane la crainte d'une "bérézina" lors des prochaines échéances électorales, après le constat du recul du parti lors des dernières législatives. Non seulement le parti a perdu une soixantaine de sièges, comparé aux résultats de 2012, mais aussi le taux d'abstention historique donne des sueurs froides aux formations politiques, encore plus pour celles qui sont... comptables de la gestion du pays depuis des lustres. La même requête de l'éviction d'Ould Abbes est également remise sur le tapis par le "trublion" Abderrahmane Belayat. Dans un entretien accordé jeudi au journal "Algérie patriotique", propriété du fils de l'ex-général-major, Khaled Nezzar, celui que la presse désignait un temps comme "l'enfant terrible du FLN", prédit une déroute au parti si la direction actuelle est maintenue. "Le parti n'a pas de direction nationale parce que le comité central déclaré n'est pas celui qui exerce actuellement. Le comité central est passé de 450 membres déclarés au ministère de l'Intérieur à 504. Il ne peut donc aborder sereinement les élections locales avec une direction illégitime", soutient Belayat pour qui Djamel Ould Abbes "n'a jamais été SG du parti". "Nous avons dit qu'il y a nécessité impérieuse de changer la tête du FLN. Nous avons fait part de notre proposition d'une direction transitoire au chef de l'Etat dans laquelle il aura son représentant personnel", ajoute-t-il, non sans mettre en garde : "Il ne faut pas que le FLN perde les élections communales, comme il a perdu les législatives. Car, perdre les élections locales, c'est l'échec annoncé à la présidentielle pour le FLN." Le changement est, à ses yeux, d'autant plus impératif que les "événements risquent de se précipiter". "Nous avons la ferme volonté de libérer le parti (...) Le temps presse et la présidentielle de 2019 pointe déjà à l'horizon. Nous devons être prêts pour ce rendez-vous capital pour le pays (...) Le président de la République est malade. Tout le monde le sait. Il est possible qu'il décide d'organiser une présidentielle anticipée", dit-il. Moins d'une année après son arrivée à la tête du FLN, Djamel Ould Abbes ne semble pas avoir réussi à contenir la tempête qui secoue le parti et à ramener la sérénité dans la "maison", dont les soubresauts réguliers constituent de véritables baromètres de la température au sein du sérail. L'unanimisme de façade qui a accompagné son intronisation inattendue à l'automne 2016 a désormais volé en éclats. Outre la manière peu orthodoxe dont il a hérité des clés de la maison face à d'autres ténors plus aguerris du parti, Djamel Ould Abbes a été éclaboussé par le scandale des listes électorales dans lesquelles son fils serait impliqué. Ce scandale qui contrastait avec ses professions de foi sur la lutte contre la "chkara" a ébranlé sa mainmise sur l'appareil et provoqué des mécontentements à la base. Mais c'est assurément la polémique suscitée autour de son passé révolutionnaire qui risque de lui sonner le glas. Dans une lettre rendue publique fin juin, l'ancien moudjahid et ex-condamné à mort, Abdelkader Guerroudj, a interpellé les membres du comité central pour témoigner sur le "passé révolutionnaire" d'Ould Abbes dont il conteste la qualité d'ancien condamné à mort. "Si la majorité du peuple algérien ignore le véritable parcours de Djamel Ould-Abbès depuis le déclenchement de notre Révolution, je suis sûr que même au sein du comité central actuel du FLN, il existe des membres qui, s'ils ne sont pas au courant de certains détails, peuvent dire ce qu'ils savent et qui reste évidemment à vérifier", écrit-il. "Je m'adresse à tous les membres du comité central à partir du moment qu'il y a eu polémique sur le sujet, et je leur dis : pourquoi ne parlez-vous pas ? Je m'estime donc fondé à croire, et je ne suis pas le seul dans ce cas, que même si certains d'entre eux ont fait preuve de courage et d'engagement dans leur vie, aujourd'hui, ils préfèrent se taire et attendre sagement leur salaire", dénonce-t-il. Abdelkader Guerroudj avait même saisi, quelque temps auparavant, le ministre de la Justice, lui demandant de lui fournir les preuves sur la prétendue condamnation à mort d'Ould Abbes. Alors, le SG passera-t-il l'été à la tête du FLN ? Peu sûr... Sauf si Bouteflika en décide autrement... Karim Kebir