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Deux décennies de trop
Publié dans Liberté le 28 - 04 - 2005

RESUME : Madjid a réussi à entrer dans son cœur, mais elle n'en laisse rien paraître. Elle le voit triste et ressent autant de tristesse que lui. Il ne semble pas voir leur différence d'âge. Lorsque Hakima appelle, Djamila hésite à se confier.
-J'ai fait connaissance avec quelqu'un, hier, et, depuis, il ne cesse de me suivre, confie Djamila. Il veut que je lui donne sa chance.
Hakima lui conseille de ne pas refuser. En fait, si sa sœur l'avait écoutée, elle aurait refait sa vie depuis longtemps.
- Essaie d'en savoir un peu plus sur lui, lui dit-elle. Si c'est un homme bien, sur sa famille, sur sa situation actuelle.
- Je ne connais rien de lui, répond Djamila. J'ai seulement vu son père. Il a subi une opération.
- Il a encore son père, s'écrie Hakima. Il a de la chance.
Quel âge a-t-il à ton avis ?
- Il est jeune, ne cache pas sa sœur. Mais il semble si sûr de lui et de ses sentiments...
- Mais tu dis qu'il est jeune, rétorque Hakima. Il a cinq ans de moins ? Ou dix ?
- Non, non, tu es encore loin du compte. Il aura bientôt trente ans.
- Ah, si jeune que ça ! s'écrie Hakima. Donc, c'est impossible entre vous. Tu as plus de vingt ans d'écart. Non, ça ne se fait pas, sa famille ne sera jamais d'accord.
- Je n'y ai pas pensé. Tout ce qui m'est venu à l'esprit, c'est qu'une grande partie de ma vie est derrière moi et que je n'ai plus rien à attendre de plus. Ce serait un gâchis pour lui. Il est jeune. En fondant un foyer, il voudra des enfants. Moi, je ne suis plus en âge de procréer. Je ne pourrais pas lui faire d'enfants. Sa vie sera vide avec moi.
Hakima est aussi de son avis. Elle la voit bien refaire sa vie mais avec un homme de son âge. Elle a senti toute la tristesse de sa sœur en parlant de sa vie. Sa vie était vide depuis longtemps.
Ce jeune homme a réussi à troubler son cœur. Il est évident qu'elle ressentait quelque chose, pour lui.
- Sois forte Djamila, lui dit-elle. Ne va pas t'engager dans une relation qui échouera d'avance.
- Oui, tu as raison. Hakima, merci d'avoir appelé.
Hakima lui souhaite, une nouvelle fois, un joyeux anniversaire et raccroche, sentant que Djamila n'avait plus envie de discuter.
Celle-ci va vite regarder par la fenêtre. Elle est déçue de constater que Madjid sois parti.
- J'espérais quoi ? se demande-t-elle. Qu'il passe la nuit, dans la rue, pour m'impressionner ? Qu'il ait eu l'audace de frapper à la porte ? Qu'est-ce qui lui a pris d'entrer dans ma vie et de me bouleverser ?
Toute la nuit, elle pensera à lui, à tout ce qu'ils auraient pu faire ensemble si elle avait été plus jeune de quinze ans, de vingt ans. Mais, elle se fait une raison. Madjid n'est pas pour elle. Il mérite mieux de la vie.
Les jours suivants, elle aura du mal à ne plus penser à lui. Au fond de son cœur, même si elle sait que rien n'est pas possible, entre eux, elle aimerait avoir de ses nouvelles. Il n'a pas cherché à la revoir. A-t-il compris, lui aussi ?
Djamila n'aura plus à se poser la question. La présence de sa fille Nadia, à la maison, sera comme un remède pour oublier Madjid. Nadia a des confidences à lui faire.
Elle a aussi pris une décision qui risque de ne pas plaire à sa mère.
(À suivre)
A. K.
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