Une autre note vient s'ajouter à la partition contre l'amnistie générale : après les familles des disparus, certaines formations politiques et autres ONG internationales, c'est au tour des parlementaires européens d'exprimer “leurs doutes” et leurs “interrogations”. Lors d'un débat organisé lundi dernier devant la sous-commission des droits de l'Homme de l'Union européenne sur les “disparitions forcées en Algérie” qui a vu la participation de Me Farouk Ksentini, président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (CNCPPDH), M. Bernard Kessedjian, ancien ambassadeur de France à Alger (1992-1994), actuellement président d'un groupe de travail à l'ONU chargé de la rédaction d'une convention internationale prohibant les disparitions forcées, Nassera Dutour, porte-parole du Collectif des familles de disparus en Algérie (CFDA) et de M. El-Yazmi, SG de la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (Fidh), “les parlementaires européens ont fait part de leurs doutes et de leurs interrogations à Me Ksentini”, annonce un communiqué du CFDA parvenu hier à la rédaction. Si le représentant de la Fidh a rappelé l'importance vitale de poursuivre une lutte universelle pour le “droit de savoir et contre l'impunité”, Me Ksentini, de son côté, émissaire de la commission ad hoc n'a eu de cesse de “clamer la non-culpabilité de l'Etat dans cet épiphénomène”, rapporte la même source. Pour sa part, Nassera Dutour “s'est demandé comment les agents reconnus responsables des 6 146 disparitions avaient pu échapper aux ordres de leurs supérieurs” lorsque, selon elle, l'on sait que chaque disparition impliquait 3 à 10 agents. Quant à Nesroullah Yous, rescapé du massacre de Bentalha, il a évoqué l'engrenage qui “avait jeté l'Etat dans la violence”. Enfin une déléguée d'Amnesty International, pour sa part, a conclu en rappelant “leur ferme opposition à l'amnistie” comme à toute forme de pardon qui se ferait au détriment du droit des victimes, comparant le projet d'amnistie générale à un “déni de justice définitif” et rappelant que “l'Algérie ne peut s'affranchir du respect des règles de droit international par un vote”, ajoute la même source. Dans ce contexte, un appel est lancé pour la constitution d'un organisme indépendant de l'Etat et doté de pouvoirs d'investigation pour permettre à toutes les victimes de la décennie écoulée d'être entendues. Comme pour répondre au SG de la Fidh, qui a réitéré la demande de son ONG de se rendre en Algérie et dont la dernière visite remonte à 2000, Me Ksentini a indiqué à ses interlocuteurs que des visas seraient accordés aux ONG qui en feraient la demande et que l'agrément des associations des familles des disparus faisait partie des recommandations de la commission ad hoc. Réjoui de l'écoute qu'il a obtenue des membres de l'Union européenne, le CFDA qui entend continuer le débat en Europe, a été invité par Hélène Flautre, députée et présidente de la sous-commission “droits de l'Homme” de l'UE. Lors de ses rencontres avec des responsables européens et des représentants des Etats à Bruxelles, le CFDA a reçu l'engagement que “le dialogue politique envisagé avec l'Algérie dans le cadre de l'accord d'association ne fera pas l'impasse sur la question des droits de l'Homme et des disparus”, conclut enfin le communiqué. K. K.