Si l'Etat continue à soutenir les importations de kits de montage, il reste que les constructeurs automobiles ne bénéficient guère de dispositions de soutien à l'exportation. Les perspectives d'exportation, envisagées par le décret exécutif n°17-344 du 28 novembre 2017 fixant les conditions et les modalités d'exercice de l'activité de production et de montage de véhicules sont d'ores et déjà compromises et plusieurs usines de montage pourraient fermer. Pour cause, le volume de production envisagée à l'horizon 2022 par les 20 constructeurs dépassera de loin les besoins exprimés par le marché (entre 350 000 et 400 000 unités/an). En effet, si l'Etat continue à soutenir les importations de kits de montage, il reste que les constructeurs automobiles ne bénéficient guère de dispositions de soutien à l'exportation. Or, une clause introduite dans l'article 2 du cahier des charges et explicitée dans les chapitres liés aux conditions d'activité stipule que les activités réalisées en Algérie devaient concourir "à la production automobile, soit en usine, soit par la sous-traitance locale et à l'exportation de pièces automobiles en résultant". D'ailleurs, l'engagement est l'une des conditions d'accès à cette activité. En effet, pour obtenir une autorisation provisoire, prévue à l'article 5, l'opérateur doit présenter dans son étude technico-économique "les niveaux d'exportation envisagés". Le cahier des charges exige que "les taux d'exportation PDR (pièce de rechange) et d'emploi totalisent, à eux deux, les 50% restants, le taux d'emploi PDR étant plafonné à 12,5%". Cette méthode de calcul, basée sur les importations soutenues, constitue une contrainte majeure aux exportations, notamment en termes de compétitivité sur le marché régional, et se répercute sur le coût global du véhicule à sa sortie d'usine. Contacté, Mohamed Yaddaden, consultant et ancien cadre du secteur de l'automobile, a indiqué que "l'exportation est un aspect inévitable. Mais je pense avant tout qu'il faudra redéfinir la politique d'exonération à l'input, c'est-à-dire à l'arrivée des kits, et travailler sur le prix de revient d'un véhicule, notamment les coûts des intrants locaux, la main-d'œuvre, le taux d'intégration, pour avoir, aujourd'hui, un prix aussi élevé. À terme, quand tous les projets seront opérationnels, on aura inévitablement une part de production qui devra être exportée". À ce propos, M. Yaddaden a affirmé que "chaque constructeur doit d'abord définir les marchés cibles pour exporter et définir les meilleurs prix pour être compétitif. Mais au vu du prix pratiqué à la sortie de l'usine et par rapport à ce qui se pratique chez nos voisins marocains et tunisiens, on va se retrouver devant des difficultés énormes pour pouvoir exporter". Abordant les facilitations à l'exportation, notre interlocuteur a estimé que "l'Etat doit encore faire l'effort pour encourager les constructeurs à exporter en instaurant des mesures incitatives, notamment sur la logistique dont les coûts sont onéreux". En 2017, les importations destinées aux seuls constructeurs automobiles qui avaient bénéficié d'autorisations de montage de véhicules en SKD (Semi Knocked Down) ont été exonérées des taxes douanières à hauteur de 30% et de la taxe à la valeur ajoutée (TVA). Le coût de ces aides au montage est estimé à près de 500 millions de dollars, pour la seule période allant de janvier à fin novembre dernier, et l'Etat poursuit sa politique de "subventions déguisées" à un secteur aussi lourd que celui de l'industrie automobile. FARID BELGACEM