Mais quelle mouche a donc piqué le controversé ex-ministre de l'Energie pour "se spécialiser" dans les attaques contre le gouvernement, dans un premier temps, avant de les ajuster avec précision contre le Premier ministre ? Après quelques jours d'accalmie, la guerre entre Chakib Khelil et Ahmed Ouyahia reprend de plus belle. En réponse aux attaques du porte-parole du Rassemblement national démocratique (RND), Sedik Chihab, qui l'accusait en des termes à peine voilés "d'intelligence" avec des forces étrangères pour "le pays et ses positions" et "le mettre sous tutelle", l'ancien ministre de l'Energie a sorti la grosse artillerie même si les termes utilisés dans sa réplique frôlent le niveau des chiffonniers. En effet, Chakib Khelil ne s'est pas contenté, dans un post sur sa page facebook, de descendre en flammes Chihab, présenté comme un rentier qui est passé de l'UGTA, avec ses mensonges et ses fabulations, à député et sénateur, sans jamais quitter les deux chambres du Parlement. Il est allé encore plus loin, en s'attaquant au bilan d'Ahmed Ouyahia, chef de gouvernement et Premier ministre, pendant dix ans et qui n'a rien fait pour le pays. Un bilan nul auquel il ajoutera sur la liste de ceux qu'il qualifie de "maîtres" de sa cible, c'est-à-dire, l'élu du RND, le nom de l'ancien ministre de l'Industrie, Abdeslam Bouchouareb. Avant de l'inviter, avec virulence et méchanceté, "vu son niveau", à "aller gonfler les pneus dans les usines de ses amis". En somme, Chakib Khelil tire sur "la partie dure" du RND qu'il accuse d'incompétence au vu de son bilan, comparativement au sien qu'il étale et détaille avec fierté et éloquence. Mais quelle mouche a donc piqué le controversé ex-ministre de l'Energie pour "se spécialiser" dans les attaques contre le gouvernement, dans un premier temps, avant de les ajuster avec précision contre le Premier ministre ? Surtout que celui-ci a été nommé par le président de la République pour le charger de mettre en pratique le plan de sauvetage économique qu'il avait validé. Cherche-t-il à neutraliser ou à affaiblir Ouyahia auquel on prête une ambition présidentielle ? Et quand bien même ce dernier aurait rappelé, encore une fois, récemment, ne jamais se présenter à la présidentielle, notamment la prochaine en 2019, si Abdelaziz Bouteflika se présentait encore, l'engagement ne semble pas avoir convaincu Khelil puisqu'il poursuit son œuvre de démolition d'Ouyahia et de son parti. Chercherait-il alors à le déloger du Palais du boulevard Dr Saâdane ? Probablement. Mais vu qu'Ouyahia fait face également à un autre feu, qui vient, depuis quelques jours, du camp allié, le FLN, avec la montée de ton de son secrétaire général, Djamel Ould Abbes, qui est allé jusqu'à organiser une tripartite parallèle à celle du gouvernement, et sortir, par la suite, dans ses activités politiques locales à l'ouest du pays, les mêmes armes tout en délimitant le territoire d'action du Premier ministre, qui se verra à l'occasion dressées devant lui de nouvelles lignes rouges inspirées du registre populiste du FLN. Des attaques synchronisées, qui vont à la fois dans le sens de gêner l'action du Premier ministre en dressant des entraves aux mesures qu'il vient de prendre tout en mettant en avant son échec à la tête de l'Exécutif. Ou alors voudra-t-on lui limiter sa liberté d'action en le réduisant à la gestion des affaires courantes...jusqu'en 2019 ? Et il ne s'agit pas de le pousser vers la sortie du gouvernement, d'autant plus que la question du cinquième mandat pour Bouteflika n'est pas encore tranchée. Car, en le maintenant à la tête de l'Exécutif, Ouyahia aura à gérer les effets des mesures d'austérité qui commencent déjà à se manifester mais aussi à organiser le scrutin présidentiel auquel il ne pourra pas participer. Une hypothèse d'autant plus plausible que Djamel Ould Abbes jure que le prochain président sera encore issu du FLN allant jusqu'à, dans une phrase fantaisiste, affirmer avoir en tête son nom. En définitive, la salve de Chakib Khelil, qui ne serait pas la dernière, est annonciatrice d'un bel orage à l'horizon. Et Ouyahia, qui se contente d'un second couteau pour réagir, risque de ne sortir de son mutisme que lorsque la bataille se corsera. Djilali B.