Les Premiers ministres fédéral et provincial, Justin Trudeau et Philippe Couillard, participeront aux festivités commémoratives, débutées vendredi, et auxquelles l'Algérie est invitée. Ils étaient plongés dans leurs prières dans cet endroit dédié à la paix qu'est la mosquée, lorsque les fidèles reçurent une rafale de balles assassines dans le dos, les mains levées au ciel. Ils accomplissaient, dans un geste de spiritualité, la cinquième prière du jour, la dernière de leur vie, quand un homme, surgi des ténèbres, est venu semer la mort à l'aveuglette dans une "maison de Dieu" que les guerres des hommes n'ont jamais profanée. Ce 29 janvier 2017 au moment de la prière d'el îcha, les habitués de ce lieu de culte ne doutaient pas un instant que cette fin de soirée dominicale allait être macabre pour eux. Un jeune étudiant de 27 ans en anthropoïde et en sciences politiques, introverti selon son entourage, armé d'un fusil, pénètre dans la mosquée et vide son chargeur, en tirant dans le tas. Dans la mosquée, c'est la panique générale, le sauve-qui-peut. L'assaillant, qui a pourtant fréquenté les bancs de la fac en questionnant les sciences sociales, continue son œuvre macabre avec un sang-froid qui désarçonne. Six personnes périssent atrocement dans cette fusillade, alors que cinq autres ont été grièvement blessées. Deux Algériens figurent parmi les victimes. Il s'agit d'Abdelkrim Hassan, un informaticien de 41 ans, père de trois filles, et Khaled Belkacemi, 60 ans, père de deux enfants et professeur titulaire et chercheur à l'Université de Laval. Deux Guinéens, un Marocain et un Tunisien ont également péri dans une horreur insoutenable. La fusillade meurtrière de la mosquée de Québec, une première au Canada, a suscité l'indignation dans le monde. Les autorités fédérales et provinciales ainsi que la classe politique et la société civile se sont mobilisées pour dénoncer unanimement cette tuerie et manifester leur solidarité aux familles des victimes et l'ensemble de la communauté musulmane. Une année après, la douleur est encore perceptible et la peur toujours omniprésente dans le cœur de tous ceux qui ont été indignés par ce massacre hors d'époque. La décision de Québec d'étaler les commémorations de ce premier anniversaire sur quatre jours participe de cette volonté de combattre les vieux démons de la xénophobie agités par des agents de l'extrême droite à l'état embryonnaire. La communauté musulmane se dit toujours stigmatisée et ses membres, en tout cas la majorité, trouvent de la difficulté à s'intégrer, parce que "racisés" à l'emploi. Cette difficulté à s'insérer socialement par l'emploi ne participe pas à harmoniser les rapports sociaux. L'accueil de plus de 40 000 réfugiés, notamment syriens, et la vague d'immigrants et de demandeurs d'asile qui a déferlé sur le Canada à la suite de l'arrivée de Donald Trump au pouvoir, a carrément décomplexé les partisans de l'extrême droite qui ont eu recours à des manifestations de rue. C'est que la stigmatisation de la communauté musulmane a été encouragée par le discours populiste ambiant. C'est justement ce discours porteur de violence que des intellectuels, dont le sociologue Rachad Antonius, veulent battre en brèche. Les Premiers ministres fédéral et provincial, Justin Trudeau et Philippe Couillard, participeront aux festivités commémoratives, débutées vendredi, et auxquelles l'Algérie est invitée. Le présumé auteur de la tuerie, Alexandre Bissonnette, subira son procès le printemps prochain. Il est poursuivi pour six chefs d'accusation de meurtre prémédité et cinq autres pour tentative de meurtre. Ses victimes ne pourront plus prier, comme lui il peut le faire en prison. Y. A.