Le massacre a eu lieu au quartier Maramane, à 7 km au nord du centre-ville. Treize personnes ont été assassinées dans la nuit de samedi à dimanche par un groupe terroriste aux portes d'Alger aux environs de 21 heures. Ce nouveau drame a ciblé les familles Kebaïli et Hamadi. Un carnage, encore un, qui vient endeuiller une wilaya, mais surtout cette ville de Blida fortement ébranlée par les actes terroristes. L'attentat meurtrier a eu lieu à Maramane, un bourg entouré de vergers dans La Mitidja. C'est un douar qui se trouve à l'extrémité de la commune de Blida. Le détail vaut la peine d'être relevé en ce qu'il renseigne sur la mobilité déconcertante dont jouissent les groupes armés. Les victimes occupent des habitations de fortune à la lisière du quartier. Pour arriver sur les lieux du drame, on emprunte une chaussée étroite sur un kilomètre. Ensuite, c'est une piste qui s'enfonce très vite dans un oued. Une dizaine de gourbis forment la partie basse de ce quartier. C'est parmi ces constructions que les terroristes ont encore frappé. Leur sinistre moisson s'est soldée par l'assassinat de 13 personnes dont 7 enfants âgés de 3 à 16 ans et trois femmes de 35, 47 et 60 ans. Les victimes ont été toutes égorgées. Le groupe terroriste était composé de 6 éléments, selon des témoins oculaires, vêtus de tenues militaires. Quatre des assaillants se sont présentés au domicile de la famille Kebaïli qui s'est installée au quartier depuis une semaine seulement. Quant aux deux autres, ils faisaient le guet. Les terroristes se sont présentés comme des militaires en patrouille et ont donc trompé la vigilance de la famille Kebaïli qui a perdu 7 de ses membres. Il s'agit du père Kebaïli Abdelkader (47 ans), de la mère Fatiha (35 ans), des 5 enfants : Fatma (16 ans), Sofiane (15 ans), Hamid (8 ans), Naziha (6 ans) et Saïd (3 ans). Un des fils Kebaïli a échappé à la mort pour avoir été, cette nuit-là, chez son grand-père qui habite Médéa. Non loin de la famille Kebaïli, les terroristes tueront 6 personnes membres de la famille Hamadi. Le père Hamadi Miloud (50 ans) et sa mère Fatima (60 ans), son épouse Metrouha (47 ans) et ses enfants Ahmed (25 ans), Oussem (12 ans) et Hadjira (15 ans). Fidèles à leur logique meurtrière, les bourreaux se son acharnés sur leurs victimes avec une haine des plus sauvages. Une des filles Hamadi, âgée de 20 ans, a réussi à s'enfuir et a pu donner l'alerte. D'une voix à peine audible et encore sous le choc, elle nous dira : “Les terroristes au nombre de 4 à 5 et en tenues militaires se sont présentés comme des militaires en patrouille. Ils ont même engagé une discussion avec mon père.” Elle interrompit l'entretien. Elle était là, perdue dans ses macabres pensées. Elle n'avait qu'un mot à la bouche : “Khalaouni ouahdi” ; rien de plus terrible, en effet, que d'avoir à porter le lourd fardeau de survivre là où les autres ont péri. Elle voulait revivre pour nous le cauchemar mais n'a pas pu. Nous avons éprouvé tout l'embarras du monde pour continuer l'entretien. Selon des proches parents des victimes, on apprendra que 2 jeunes filles, Yamina (18 ans) et Zohra (25 ans), membres de la famille Hamadi, ont été enlevées par les terroristes. Encore une fois, les terroristes se sont attaqués à de paisibles citoyens sans défense qui résident dans des logements de fortune érigés en parpaings et en zinc. Les deux familles ciblées avaient fui la région de Aïn Boucif (wilaya de Médéa), dont le maquis est infesté de terroristes du GIA. Le lieu du drame révélera l'extrême pauvreté dans laquelle vivent ces familles. Les lieux du drame offrent des images insoutenables. Les flaques de sang, des lambeaux de chair, des effets vestimentaires et la literie couvraient le sol. Des produits alimentaires et autres objets appartenant aux victimes étaient éparpillés un peu partout. Les lâches criminels ont repris le même chemin par lequel ils étaient venus pour disparaître dans la nature après leur forfait. Selon des gardiens de vergers qui entourent le quartier Maramane, les terroristes, au nombre de 6, se sont dirigés vers la localité de la Chiffa. Durant notre passage, une foule nombreuse était amassée devant les domiciles des victimes. Tous ceux qui sont venus soutenir les proches de la famille des victimes dans le malheur qui s'est abattu sur eux fondaient en larmes. Les citoyens de ce hameau font porter la responsabilité du massacre aux autorités civiles et militaires qui n'ont jamais accédé à leur demande d'obtenir des armes. La population locale est encore sous le choc après cet abominable massacre ; les victimes ont été enterrées, hier, au cimetière Zabana de Blida en présence d'une foule nombreuse. M. A.