Soupçonnant une surfacturation des prix sortie d'usine, M. Yousfi a "fuité" la liste des prix pour mettre la pression sur le ministère du Commerce. Le ministre du Commerce, Mohamed Benmeradi, a évoqué, depuis Médéa où il était en visite de travail jeudi, "un durcissement du contrôle en matière de commercialisation ou de vente de véhicules, dans le but de lutter contre toute forme de spéculation qui porterait atteinte, aussi bien à l'économie du pays qu'aux portefeuilles des citoyens", affirmant, en même temps, que "le retour à l'importation des véhicules n'est nullement envisageable, ni cette année ni l'année d'après". Le ministre ne donne pas de précisions sur les mesures à prendre pour remédier à la situation, à l'encontre des réfractaires ou encore des revendeurs qui bénéficiaient de "quotas" en contrepartie d'une commission, notamment. D'ailleurs, il ne comprend pas que Benmeradi ait attendu la publication des prix de véhicules sortie d'usine pour réagir. Il avait l'opportunité de le faire en janvier dernier, lorsque son collègue de l'industrie, Youcef Yousfi, avait indiqué qu'il allait prendre des mesures pour juguler la majoration exagérée des tarifs sur le marché automobile, alors que les constructeurs avaient bénéficié des avantages fiscaux et parafiscaux et qu'ils devaient rationnaliser leurs marges bénéficiaires. Bien avant les premières les journées techniques sur la sous-traitance véhicule (JTSV) qui se sont déroulées les 5 et 6 mars en cours à l'hôtel El-Aurassi (Alger), M. Yousfi s'était fixé l'objectif de mettre à l'index les constructeurs quant aux tarifications abusives des voitures Mae in Bladi . Lors de ces mêmes journées, alors que la thématique ne s'y apprêtait guère, M. Yousfi avait exigé des opérateurs d'envoyer illico-presto les tarifs sortie d'usine. Dix jours plus tard, le ministère de l'Industrie jette un pavé dans la mare en fuitant les résultats de l'enquête demandée. Une liste qui a créé une onde de choc chez les opérateurs et les clients. Surtout chez les opérateurs qui n'ont pas compris le sens de la démarche de Yousfi. Contactés par nos soins, des opérateurs ont refusé de commenter cette démarche qui, par ailleurs, a semé une confusion sur le marché. Si certains sites Internet et autres blogs sont vite allés en besogne en annonçant que les prix publiés par le département de M. Yousfi sont ceux qui devaient être pratiqués sur le marché. Ce qui est faux, car il s'agit du prix de revient d'un véhicule à sa sortie des chaînes de montage et non le prix public. Autrement dit, ce prix ne prend pas en considération la taxe sur le véhicule neuf (TVN), son transport vers les showrooms et les dépôts, sa préparation, sa commercialisation, les charges liées aux salaires et à la logistique et, enfin, la marge bénéficiaire du constructeur. Du coup, l'opinion publique est désorientée, notamment par certains médias publics qui ont évoqué un communiqué du ministère de tutelle. Cela ne justifie nullement les marges astronomiques pratiquées sur certains modèles de voitures sur le marché, et ce, même si les prix sont libres en Algérie. D'où la riposte du ministre du Commerce qui, vraisemblablement, a décidé de se réapproprier du dossier pour prendre des décisions à l'encontre des constructeurs qui abusent des marges pratiquées, voire d'une "surfacturation déguisée". Il faut savoir que les constructeurs étaient informés de la démarche de M. Yousfi. Pour preuve, la veille des journées sur la sous-traitance, une rumeur faisait état de la baisse immédiate et substantielle des prix des véhicules MIB. La rumeur avait fait le tour chez les revendeurs aux marchés de l'occasion et des nouveaux garagistes. FARID BELGACEM