Est-il économiquement viable et politiquement correct qu'un titre non distribué(plusieurs titres sont jetés à leur sortie des imprimeries) bénéficie de la manne publicitaire de l'Etat ? Invité, jeudi, au Forum d'El Djoumhouria à Oran, Djamel Kaouane, ministre de la Communication, a répondu aux nombreuses questions des journalistes présents. Dans ses réponses, le ministre a présenté un secteur en perpétuelle évolution où la relation entre éditeurs, journalistes et tutelle baigne dans une symbiose telle qu'elle ferait rougir les plus grandes démocraties. Interrogé sur l'épineuse et sempiternelle problématique de la publicité, le ministre a assuré que la manne publicitaire étatique bénéficie à tous les titres de la presse nationale. Le ministre a annoncé que cette manne est distribuée selon un seul et unique critère : l'argument économique. Mais il en faut plus, beaucoup plus, pour justifier une gestion des plus sombres de la publicité, notamment celle étatique. Il n'est un secret pour personne que la publicité étatique gérée en solo par l'Anep ne répond à aucun critère objectif, et encore moins économique. Est-il économiquement viable et politiquement correct qu'un titre non distribué (plusieurs titres sont jetés à leur sortie des imprimeries) bénéficie de la manne publicitaire de l'Etat ? Les exemples sont légion, car, depuis la réduction de cette manne, des dizaines de titres ont tout simplement disparu. Ce qui prouve que leur existence était liée exclusivement à la rente distribuée par l'Anep, pour ne pas dire qu'elle était justement un moyen pour les "affairistes" de capter des milliards à travers les pages de publicité dont l'Anep les arrosait quotidiennement durant les années de leur existence. À cette gestion peu loyale de l'argent public s'est greffé une gestion politicienne et clientéliste de cette même manne. Aucun organe de presse dont la ligne éditoriale n'est pas du goût du pouvoir ne bénéficie de la publicité étatique. Ces mêmes journaux sont également exclus de la publicité privée, car d'énormes pressions sont exercées sur les patrons d'entreprises privées pour les empêcher d'annoncer sur des journaux considérés "trop critiques" ou encore "favorables à l'opposition". Il faut se demander s'il est concevable sur le plan économique pour un entrepreneur de faire paraître ses annonces sur un titre à moindre tirage ? Le ministre de la Communication et les concepteurs, au sein du gouvernement, de ce mode de gestion de la publicité, n'y trouvent pas d'inconvénient. Annoncer dans un journal public, dont le tirage ne dépasse pas les abonnements des institutions et dont la portée ne déborde pas du seuil de son siège, est-ce intéressant pour un opérateur économique, privé ou public soit-il ? Djamel Kaouane assure que la gestion de la publicité répond au critère économique, mais ne cite pas ces journaux sans lectorat qui bénéficient de la générosité de l'Anep chaque jour, ni ces autres quotidiens à fort tirage dont la publicité Anep équivaut à zéro dinar depuis des années. Mohamed Mouloudj