Les départements ministériels lancent des projets sans en maîtriser les coûts et encore moins les délais de réalisation. La faiblesse d'évaluation des projets conduisant à la révision de leurs dotations et par conséquent au non-respect des délais de leur réalisation. Dans son rapport d'appréciation de la loi portant règlement budgétaire de l'exercice 2015, la Cour des comptes a mis en relief le fait que sur l'enveloppe consacrée aux projets d'investissement estimée à 3 615,072 milliards de dinars, 760,69 milliards de dinars sont alloués à la réévaluation des projets. Il est vrai que l'Algérie n'était pas le seul pays dans le monde où l'on enregistrait des cas de réévaluation des projets. En effet, la réévaluation des projets est générée par plusieurs facteurs dont l'écart entre le prix de soumission et celui fixé par les bureaux d'études, l'insuffisance du nombre de bureaux d'études ainsi que les avenants aux contenus des projets lors de leur réalisation. Mais quand la réévaluation atteint les 100% du montant du projet, cela soulève des interrogations sur la transparence dans l'utilisation des ressources financières. L'exemple le plus édifiant reste, sans conteste, celui de de l'autoroute Est-Ouest. Après plus de dix ans de travaux, d'énormes surcoûts et un scandale de corruption, elle n'est pas encore achevée. D'ailleurs, le budget d'équipement du ministère des Transports et des Travaux publics pour l'année 2018 prévoit, au titre des réévaluations, 12 milliards de dinars, environ 120 millions de dollars, pour les lots centre et ouest déjà achevés. L'autoroute Est-Ouest constitue un gouffre financier, d'autant que la partie reliant l'autoroute Est-Ouest à la frontière tunisienne, un tronçon de 80 km restant à achever, situé dans la wilaya d'El-Tarf, et qui demandera, lui aussi, une nouvelle enveloppe financière. L'autre projet, sans doute le plus controversé, est la construction de la Grande mosquée d'Alger. Plus d'un milliard d'euros ont été engagés pour la mener à bien et les retards accumulés n'ont fait que grossir l'enveloppe budgétaire. Les annonces sur la date de sa livraison se suivent et se ressemblent. Les travaux de construction ont débuté en août 2012 et étaient initialement supposés s'achever dans un délai de 42 mois, à savoir en octobre 2015. En février 2015, le délai annoncé se situait en septembre 2016 et il est vite passé, à fin 2016 puis fin du premier trimestre de l'année 2017. La dernière annonce concernant la livraison de l'édifice situe la date à fin 2018. Pour beaucoup, la méga-mosquée va coûter non pas 1milliard d'euros, mais beaucoup plus, en raison des retards accumulés à cause des différentes péripéties qu'a connues le projet. Outre ces deux projets, d'autres moins visibles sont touchés. En effet, des réévaluations importantes des coûts des projets, cible notamment les secteurs des travaux publics, des transports, de l'hydraulique et du bâtiment. Aucun secteur n'est en reste. Pourtant, dès 2010, l'Algérie avait pris une série de mesures dans la perspective de maîtriser le coût des projets. Parmi elles : la soumission de chaque réévaluation supérieure à 15% du coût initial du projet à une approbation du Conseil des ministres. Le gouvernement avait, également, décidé d'exiger une expertise des études de maturation des grands projets avant le lancement de leur réalisation. Une démarche qui n'a, semble-t-il, pas atteint les objectifs escomptés. Saïd Smati