Un instant, il était question d'ouverture des plis concernant les offres pour la réalisation du métro d'Alger. Finalement, c'était aux groupes Alstom et Siemens-France de présenter leurs “offres techniques” pour la réalisation du “système intégral” d'équipement du métro d'Alger. Tout cela s'est passé, selon la formule consacrée, “lors d'une séance publique d'ouverture des plis” tenue au siège de l'Entreprise du métro d'Alger (EMA). Sauf que, dans ce cas de concurrence “planifiée”, ce n'est pas le client qui a ouvert “les plis”, mais les offreurs puisqu'il s'agissait, pour eux, de présenter le service dont ils ont déjà obtenu la commande ! On se souvient que pour répliquer à la déception officielle des Algériens qui ne voyaient pas les entreprises françaises venir investir dans notre pays, des ministres de l'Hexagone avançaient la justification imparable de l'autonomie du capital. Il apparaît, depuis cette opération, que la souveraineté des entreprises françaises en matière d'investissement ne les oblige pas à se débrouiller pour se procurer des marchés. La loi du marché subit là le sort de toute loi : on ne la respecte que là où on est contraint de la respecter. Il semble qu'en Algérie, et malgré la célébration récurrente de la réforme, le marché n'a pas encore acquis le statut de règle. D'où cette étrange formule de “consultation restreinte aux entreprises françaises”. Certes, un “partenariat d'exception” est concevable entre deux nations. Il peut aussi privilégier les opérateurs respectifs dans leur partenariat et dans leurs interventions bilatérales. Mais le cadre conventionnel devrait, dans ce cas, précéder l'opération en question. Peut-être qu'une raison d'Etat, voire une raison économique ou technique, justifie cette démarche. Et d'ailleurs, il faut bien une raison supérieure pour oser une entrave à la concurrence parfaite, puisqu'il faut bien financer le différentiel forcément occasionné par la restriction de la consultation. Sinon le marché ne mérite pas le discours inapproprié qui entoure sa publicité d'“ouverture des plis” et autres “consultations”. Mais comme aucun accord privilégiant les groupes français en Algérie n'existe, il restait à expliquer la motivation extra-économique, et donc forcément politique, à l'origine de la procédure. Le traité d'amitié attendu des deux côtés de la Méditerranée aurait peut-être pu apporter les raisons d'un traitement de faveur, nécessairement réciproque, dans les relations bilatérales. Et structurer le rapprochement entre opérateurs des deux rives. Mais, ici comme ailleurs, le pouvoir n'est pas encore apte à décentraliser : les relations privilégiées, y compris avec des entreprises, doivent relever de sa propre souveraineté, donc de la souveraineté d'Etat. En attendant de connaître les conditions financières, le réchauffement des relations entre Alger et Paris vaut bien une messe, mais il faut le dire surtout quand on s'éloigne de l'orthodoxie en matière de coopération. Tout se passe comme s'il s'agit de compenser, par des projets ponctuels, l'incapacité à produire des cadres structurants pour les relations algéro-françaises. Et tout le monde sait qu'entre nations, des ententes d'amis ne remplacent pas un pacte d'amitié. M. H.