Tel un orchestre, trois des partis de la "majorité présidentielle" ont accordé leurs violons. Loin d'être un fait du hasard, le RND, TAJ et puis une nouvelle fois le FLN ont appelé, à deux jours d'intervalle, le chef de l'Etat à briguer un nouveau mandat présidentiel. Si les appels du pied du FLN pour voir Abdelaziz Bouteflika rempiler pour un nouveau mandat à la tête de l'Etat ne sont pas nouveaux, les sorties du RND et de TAJ ont de quoi surprendre. S'il est évident depuis longtemps que ces deux formations politiques ne peuvent pas jouer en dehors de la sphère bouteflikienne, le timing choisi pour lancer l'appel au chef de l'Etat ne semble pas être de leur seul choix. Preuve en est que le parti d'Amar Ghoul a organisé, dans l'urgence, une rencontre pour emboîter le pas au parti d'Ahmed Ouyahia qui venait d'anticiper, jeudi, sur les résultats des travaux du conseil national de son parti. Les deux formations politiques, nées pour servir le système, ont visiblement reçu la consigne de suivre le pas du FLN dans ce qui semble être une inévitable marche pour la présidence à vie pour Abdelaziz Bouteflika. Pour faire admettre leurs démarches, les trois formations politiques ont présenté l'argument de la "stabilité". L'argument rappelle d'ailleurs le scénario de 2014. Quelques mois avant le scrutin de cette année-là, des partis du pouvoir, des organisations de masse et les médias publics ont mis en branle un plan visant à "légitimer" un nouveau mandat au chef de l'Etat qui venait pourtant de quitter l'hôpital parisien du Val-de-Grâce, après une longue hospitalisation due à un AVC subi en avril 2013. En plus de la "stabilité", brandie comme un argument d'une campagne qui se fait une nouvelle fois par procuration, les partisans du chef de l'Etat ont rajouté un autre titre à leurs discours : ils répètent, à l'envi, que le bilan présidentiel plaide en faveur de la "continuité". Pour cela, le FLN a été le premier à innover en élaborant un "bilan détaillé" des "réalisations". Le bilan n'est toujours pas rendu public. Mais il est vite devenu un élément de langage. Sur le terrain, des ministres et responsables locaux s'affairent à maintenir la propagande autour des "réalisations" du chef de l'Etat. Une gigantesque campagne de communication, montrant des citoyens recevant des clefs de leurs logements, a même été orchestrée. Les chaînes de télévision et la Radio nationale ont retransmis des cérémonies synchronisées le soir du 27e jour du mois de Ramadhan. La moindre activité est mise sur le compte du chef de l'Etat. L'opposition parie sur la mobilisation populaire La campagne pour un nouveau mandat présidentiel entamée par les partis de la "majorité présidentielle" inquiète l'opposition. Le RCD a été le premier à qualifier, vendredi, ces appels de "ridicules". Le parti démocrate appelle "tous les patriotes à rester en alerte pour contrer un affront de trop pour le pays". Le même appel est lancé par Soufiane Djilali, président de Jil Jadid. "L'heure est grave pour le pays, pour nos enfants, pour nous tous. Nous sommes devant un pouvoir dont l'insolence n'a d'égale que son indignité", a écrit le dirigeant politique sur sa page Facebook. "Les citoyens doivent maintenant agir. L'humiliation que le système Bouteflika veut infliger au pays doit lui être retournée. Commençons par nous mobiliser sur les réseaux sociaux. Nous avons quelques semaines pour le faire", écrit encore Soufiane Djilali qui a lancé récemment une initiative avec d'autres personnalités visant notamment à demander au chef de l'Etat de "renoncer à briguer" un nouveau mandat à la tête de l'Etat. Mais cela ne semble pas perturber ce que Saïd Sadi a estimé inévitable. "Il ne faut pas se leurrer. Sauf miracle, pourvu qu'il advienne, c'est parti pour un cinquième mandat", avait prédit l'homme politique à partir du Canada. C'était en avril dernier. Ali Boukhlef