Les derniers chiffres disponibles au ministère de la Santé font ressortir un taux de mortalité maternelle de 57 pour 100 000 naissances. L'affaire du décès de la parturiente et de son bébé l'été de l'année dernière, à Djelfa, qui a été suivie d'une condamnation d'emprisonnement du personnel médical, a inspiré, semble-t-il, le ministère de la Santé pour réfléchir à une meilleure manière de sécuriser l'acte d'enfantement en Algérie. En effet, l'épisode dramatique d'Aïn Ouassera, qui a défrayé la chronique, a mis à nu et confirmé la débandade qui régnait dans plusieurs établissements de parturition, puisque les chiffres de mortalité maternelle ou infantile recensés à l'issue de chaque exercice annuel n'ont pas fait réagir les prédécesseurs de Mokhtar Hasbellaoui, au département de la Santé. Pour rappel, le tribunal d'Aïn Ouassara a condamné à des peines de prison, en septembre 2017, trois sages-femmes, deux responsables de l'administration et un gynécologue pour "négligences coupables". Le ministre de la Santé a immédiatement mis en place un comité national d'experts gynécologues pour penser un plan de prise en charge des femmes enceintes. Ce groupe de travail, après deux mois de conclave, a élaboré une stratégie qui définit les missions et l'organisation liées à la prise en charge, la qualité et à la sécurité des soins destinés à la femme enceinte. Pour la tutelle, le dossier de prise en charge de la parturiente est prioritaire, puisqu'il traite d'un problème majeur de santé publique. "La réflexion engagée a été sanctionnée par l'élaboration d'un guide de prise en charge de patiente enceinte afin d'assurer la qualité et la sécurité des soins", soutiendra le Dr Fewzi Benachenhou, directeur des structures de santé de proximité au ministère de la Santé. En fait, il s'agit d'un guide d'organisation qui balise le circuit susceptible d'assurer une coordination entre tous les intervenants concernés par cette question aussi bien en amont dans la prise en charge de la parturiente, qu'en aval, en cas de problèmes ou en cas de décès maternel ou infantile. Les promoteurs de cet outil organisationnel précisent que le nouveau schéma devant assurer les soins aux futures mamans ne s'adresse pas uniquement aux professionnels de la santé du secteur public, mais concerne aussi les gynécologues installés ou exerçant dans des établissements privés. Le nouveau guide d'organisation des accouchements, en vigueur depuis le début de l'année dans certaines régions, devra participer à améliorer la position de l'Algérie en matière de mortalité infantile ou maternelle. Selon notre interlocuteur, les tendances enregistrées ces dernières années soit pour la mère, soit pour le nouveau-né classent l'Algérie dans une position plus au moins acceptable, soit en pays intermédiaire, selon l'Organisation mondiale de la santé. Les derniers chiffres disponibles au ministère de la Santé font ressortir un taux de mortalité maternelle de 57 pour 100 000 naissances. Les raisons liées à la mortalité maternelle sont, dit-on, l'hémorragie lors de la délivrance ou encore la toxémie gravidique qui est une affection survenant en fin de grossesse et caractérisée par une hypertension, de l'albuminurie et des œdèmes. Pour l'année 2017, l'on a enregistré 1,06 million de naissances dont 88,2% ont été réalisées dans les structures publiques, soit 924 000 nouveau-nés. Le taux de mortalité maternelle pour 2017 a baissé, il est de 57 décès pour 100 000 accouchements. Une organisation hiérarchisée pour situer les responsabilités Pour cela, il importe de savoir que 211 services de gynécologie-obstétrique sont ouverts au niveau national dont 5 820 lits dédiés à l'obstétrique. Ces places d'accouchement sont disponibles à travers les CHU, les EHS (établissements hospitaliers spécialisés) et les EPH (établissements publics hospitaliers). Dans le même registre, 420 autres maternités intégrées au niveau des EPSP pour accouchement par voie basse offrent 3 270 lits. Ces réseaux de structures appelés à se normaliser progressivement sont encadrés par plus de 750 gynécologues, plus de 1 400 pédiatres et 1 200 médecins réanimateurs. Les sages-femmes, qui sont la cheville ouvrière des maternités, sont au nombre de 8 700 au niveau national. Ces chiffres liés à l'encadremen et à la prise en charge de la femme gestante, sont, sur le plan théorique, largement suffisants. Mais dans la réalité, les choses se présentent parfois différemment. Un petit tour au niveau du service gynécologie-obstétrique d'un établissement hospitalier public d'Alger-Ouest ou d'Alger-Est suffit pour constater la galère des parturientes et leurs accompagnateurs. Cela concerne évidemment les futures mères qui n'ont pas les moyens financiers nécessaires pour aller dans une clinique privée. Les structures d'accouchement privées offrent des conditions "d'hospitalisation acceptables", en contrepartie de factures faramineuses. Cependant en cas de risque maternel, fœtal ou obstétrical, la parturiente est évacuée vers le CHU. Le nouveau circuit de prise en charge de la femme gestante est marqué par une organisation hiérarchisée en quatre niveaux. À en croire le directeur des structures de santé proximité, le nouveau schéma devra assurer "une organisation normalisée" quant à la prise en charge et garantir la transparence pour situer les responsabilités en cas d'incident dramatique. "Le statut de la femme enceinte sera déterminé depuis le premier mois de grossesse jusqu'au jour de l'accouchement. Un carnet de suivi sera mis à sa disposition. Ce processus permettra même d'identifier le lieu de l'accouchement. La femme gestante sera orientée, le jour J, soit vers une maternité intégrée sans bloc opératoire, soit vers une structure d'accouchement dotée d'une salle d'intervention chirurgicale, ou encore vers un CHU ou un établissement hospitalier spécialisé mère et enfant. Le praticien prendra la décision en fonction des données rapportées sur le carnet qui détermine le statut de la grossesse à bas risque ou à haut risque." L'avenir nous dira, enfin, si l'organisation des accouchements, version Mokhtar Hasbellaoui, parviendra à sécuriser au maximum cette prise en charge aussi bien obstétricale que néonatale. Hanafi H.