D'ex-militaires, 200 selon les organisateurs, ont tenté de bloquer la circulation automobile vers la capitale en empruntant l'autoroute et voulaient organiser une marche en direction d'Alger. Aux premières heures de la journée d'hier, plusieurs convois de la Gendarmerie nationale ont été dépêchés au niveau de la commune de Lakhdaria dans le but de "sécuriser" le tronçon autoroutier reliant Lakhdaria à Dar El-Beïda, et ainsi, faire barrage aux militaires retraités, invalides et les ayants droit de l'Armée nationale populaire (ANP) qui ont tenté de marcher vers la capitale. En effet, une centaine de gendarmes a été appelée en renfort pour contenir cette action de protestation. Lakhdaria est devenue, l'espace d'une journée, le "dernier rempart" à franchir pour arriver aux portes de la capitale, érigée par le pouvoir en "forteresse" quasi inviolable. Même la RN5 était quadrillée de bout en bout par les services de sécurité. De la localité de Zeboudja, en passant par la commune d'Aomar et en arrivant vers les gorges de l'ex-Palestro, à la frontière avec la wilaya de Boumerdès, des barrages filtrants ont été dressés pour refouler les contestataires. En effet, c'est à 8h30 que près de 200 ex-militaires, selon les organisateurs, ont tenté de bloquer la circulation automobile vers la capitale, en empruntant l'autoroute, et voulaient à tout prix organiser une marche en direction d'Alger, mais ils ont été stoppés net par les éléments de la Gendarmerie nationale. Ces radiés et retraités de l'institution militaire durant les années 1992 à 1998 scandaient des slogans tels que "Non à l'injustice", "Nous sommes tous des Algériens", ou encore "Où sont nos droits ?" Vers 14h, des dizaines de manifestants ont été "débarqués" par les services de sécurité sur l'autoroute Est-Ouest, à proximité de la station-service de Lakhdaria. "Nous étions à Dar El-Beïda, lorsque les services de sécurité nous ont embarqués de force, puis nous nous sommes retrouvés sur l'autoroute Est-Ouest", témoignera Aoune Athman, retraité de l'ANP. Ses camarades et lui ont assuré vouloir, coûte que coûte, retourner auprès de leurs frères d'armes qui se trouvaient encore aux portes d'Alger. "Notre cause est juste et nos revendications sont légitimes. Nous ne réclamons que nos droits", ont-ils assuré. Quant à la circulation automobile, elle a été entièrement paralysée. Et les automobilistes ont été, pour ainsi dire, pris au piège sous une température caniculaire. Dans cette configuration hypersécuritaire, ayant pour unique but de verrouiller les portes d'Alger, les automobilistes et autres voyageurs subissent les conséquences de la politique ultrasécuritaire imposée par les autorités, pour "protéger" la capitale. Les habitants d'Alger-Est ont également subi ces désagréments, puisque la seule mesure que les services de sécurité prévoient pour empêcher les marches est l'installation de barrages filtrants. Les habitants de Rouiba ou d'Aïn Taya, par exemple, ont dû patienter pendant trois longues heures pour arriver à leurs lieux de travail. Ceux qui ont pu échapper à l'entonnoir sécuritaire dressé à l'entrée d'Alger et aux Bananiers ont vite été rattrapés devant la porte de la capitale qu'ont pu atteindre des protestataires qui ont carrément investi la chaussée des deux côtés, bloquant ainsi la circulation. Un autre bouchon s'est vite constitué au niveau des Sablettes où les ex-soldats ont commencé à scander des slogans portant sur leurs revendications et chantant Pour toi ma patrie (Min adjlika ya watani). Ils rappellent, également, que cela fait une année et demie que personne là-haut (les autorités) ne veut les écouter et que marcher sur Alger est la seule solution qu'ils ont trouvée pour se faire entendre. Les automobilistes ont dû prendre leur mal en patience, mais des signes d'irritation sont visibles pour certains d'entre eux, ceux qui ont subi le goulot de l'entrée d'Alger. "Nous ne sommes ni des criminels ni des perturbateurs", crie un protestataire avec un accent de l'Est en montrant du doigt un ami à lui, expliquant que celui-ci a sacrifié des années de sa vie pour le pays. La scène durera un long moment avant que ne se libère la voie. RAMDANE BOURAHLA