L'Arabie saoudite surprend encore par ses sempiternels revirements sur le marché pétrolier. Le royaume wahhabite dit vouloir limiter sa production et ses exportations pour ne pas entraîner une surabondance de l'offre, alors que, il y a quelques jours, le roi Mohamed Ben Salmane avait affirmé la disponibilité de son pays à pomper davantage, à l'issue d'un entretien téléphonique avec le président américain, Donald Trump. Changement de stratégie : le ministre saoudien du Pétrole a indiqué, jeudi, que les exportations du royaume n'augmenteraient pas en juillet et reculeraient légèrement en août, a rapporté l'agence Bloomberg. L'Arabie saoudite entend réduire ses exportations de brut de 100 000 barils par jour en août ; une annonce somme toute contradictoire avec les précédentes prévisions qui tablaient sur une production record de 10,8 millions de barils par jour durant le même mois. Mais quelle mouche a donc piqué les Saoudiens qui semblent négocier un virage à 180° ? Les responsables du royaume ont dû ressentir les effets pervers de leur récent plaidoyer en faveur d'une hausse de la production. Aussitôt décidée par l'Opep, aussitôt appliquée par l'Arabie saoudite, premier producteur de l'organisation et premier exportateur mondial de brut. En effet, au lendemain des réunions de l'Opep et de ses alliés non-Opep, tenues les 22 et 23 juin dernier à Vienne (Autriche), l'Arabie saoudite a ouvert les vannes de son géant national Saudi Aramco, augmentant nettement ses exportations en juin, ce qui a contribué à une nette baisse des prix depuis le début du mois. Hier, le marché se dirigeait vers sa troisième perte hebdomadaire, alors que le Brent a reculé déjà de plus de 8% depuis le début du mois en cours. Il semble que les Saoudiens ont tempéré leurs ardeurs sous l'effet également d'une production américaine qui évoluait à vive allure, faisant planer à nouveau les risques d'une surabondance du marché. La production américaine de brut a affiché la semaine dernière un nouveau record à 11 millions de barils par jour (mbj). Les réserves commerciales de brut ont également achevé la semaine avec une hausse de 5,8 millions de barils. Au rythme où vont les choses, si certains grands producteurs ne resserrent pas les vannes, il serait possible que le marché renoue avec les angoisses d'avant-juin 2014 qui ont contribué au contrechoc pétrolier. Quand bien même la production serait agonisante chez nombre de producteurs de l'Opep, dont la Libye, le Venezuela et l'Iran. En tout cas, le marché est particulièrement volatil depuis mai ; d'importants risques pèsent désormais sur l'offre comme sur la demande. La recrudescence des tensions commerciales entre les Etats-Unis et leurs partenaires commerciaux ne fait que complexifier davantage l'équation de la stabilisation du marché. Les producteurs dont l'économie dépend essentiellement de la cotation du baril, à l'image de l'Algérie, devraient composer désormais avec un marché extrêmement volatil. Le besoin d'un nouveau contrat social n'a jamais semblé aussi pressant. L'actuel contrat, qui repose sur le principe de fournir des emplois et des subventions en échange de la paix sociale, chavire décidément sous l'effet d'une rente moins généreuse. Ali Titouche