Grosse tempête en mer Rouge, cette étendue d'eau continentale, séparant naturellement l'Afrique de l'Asie au Moyen-Orient. Et pour cause, deux pétroliers saoudiens naviguant dans les eaux du détroit de Bab al-Mandeb (en mer Rouge) ont été la cible, jeudi dernier, d'une attaque de missiles provenant de rebelles yéménites. Se sentant en insécurité et craignant pour ses livraisons pétrolières, l'Arabie saoudite, premier exportateur mondial d'or noir, a décidé de suspendre "temporairement" ses exportations d'hydrocarbures, en attendant que la sécurité puisse être garantie. De fait, la mesure, qualifiée par des experts d'une extrême importance, prive le marché de gros volumes de pétrole. Un blocage de Bab al-Mandeb arrêterait pratiquement les échanges pétroliers par le canal de Suez, a d'ailleurs commenté Sukrit Vijayakar, analyste chez Trifecta Consultants, cité par des agences de presse. Et si les perturbations continuent, l'offre dans la Méditerranée et outre-Atlantique va s'en ressentir, et le prix du Brent devrait grimper, ont estimé, pour leur part, les analystes de Commerzbank. Sur le terrain, les cours du pétrole jouent en fait au yo-yo. Ils ont terminé en baisse le 27 juillet sur le marché new-yorkais Nymex. Mais cela n'aura pas empêché le Brent d'enregistrer sa première hausse hebdomadaire depuis quatre semaines (74,71 dollars le baril). Le contrat de septembre sur le brut léger américain (West Texas Intermediate, WTI) a perdu, lui, 92 cents, soit 1,32%, à 68,69 dollars le baril. Pour l'instant, les acteurs du marché se montrent fébriles face aux annonces de Riyad sur la suspension "momentanée" de ses exportations, qui pourraient déclencher des réponses de la part des pays voisins, ou des Etats-Unis, a remarqué John Kilduff d'Again Capital. Il n'est, toutefois, pas facile de prévoir comment va évoluer la situation, dans les jours à venir, et personne ne peut déterminer dans quelle mesure la décision saoudienne pourrait affecter le marché parce que le terme "temporaire" est trop large pour permettre de formuler un avis clair sur l'attitude du marché. L'attaque dont ont fait l'objet les deux tankers saoudiens intervient aussi au moment où sur la côte est de l'Arabie saoudite, le détroit d'Ormuz est revenu sur le devant de la scène, l'Iran menaçant récemment d'y perturber le trafic en réponse aux sanctions américaines. Mais, Téhéran ira-t-elle jusqu'au bout et mettra-t-elle à exécution sa menace ? Peu probable ! En supposant maintenant que les flux des exportations ne soient pas bouleversés à long terme, il n'en reste pas moins que ces deux événements (missiles yéménites contre les deux navires saoudiens et probable fermeture du détroit d'Ormuz) rappellent le niveau élevé de risques géopolitiques qui planent actuellement sur le marché pétrolier. Quoi qu'il en soit, l'Arabie saoudite, un pays en difficultés financières actuellement comme le sont tous les autres Etats pétroliers, n'a pas intérêt à ce que la suspension de ses exportations pétrolières perdure. Youcef Salami