La commission de visionnage a refusé de lui octroyer un visa culturel "Fragments de rêves" de Bahia El-Fegoun censuré aux RCB La commission de visionnage n'a donné aucune explication sur le refus d'octroi d'un visa culturel pour la projection du documentaire de Bahia Bencheikh El-Fegoun, prévue jeudi soir à la cinémathèque de Béjaïa. Pour dénoncer une atteinte à la liberté d'expression, les organisateurs des RCB ont décidé d'arrêter les rencontres jusqu'à ce que "les conditions de libre exercice soient assurées". Après l'interdiction de la projection de Ben M'hidi de Bachir Derraïs, un autre film vient d'être touché par la censure. En effet, le ministère de la Culture a encore sévi en refusant d'octroyer le "visa culturel" au documentaire Fragments de rêves de Bahia Bencheikh El-Fegoun, qui devait être présenté jeudi lors de la soirée de clôture des 16es Rencontres cinématographiques de Béjaïa. Devant une salle comble, Leïla Aoudj, directrice artistique des RCB, a indiqué que "le film de Bahia El-Fegoun n'a pas reçu de visa culturel pour sa projection, et ce, sans aucune argumentation de la part de la commission de visionnage". Et d'ajouter : "N'ayant aucune information sur cette commission chargée d'octroyer des visas culturels pour la projection des films, ni sur les critères d'octroi ou non de ces visas, une demande de recours a été adressée par les RCB au ministère, sans réponse à ce jour des autorités concernées." Considérée comme la plus ancienne manifestation cinématographique en Algérie, "impulsée" par la société civile "espace de débats francs et de liberté, la programmation a toujours été effectuée dans le cadre du respect des valeurs démocratiques et du respect de la dignité humaine". À cet effet, Mme Aoudj a informé avec beaucoup d'émotion de l'arrêt des RCB jusqu'à ce que "les conditions de libre exercice soient assurées". Cette décision qui a bouleversé plus d'un cinéphile dans la salle a été prise car "ne pouvant plus disposer de sa liberté de choix de film, les RCB considèrent ce non-octroi de visa culturel sans aucune argumentation comme une atteinte à la liberté d'expression". Pour sa part, Bahia Bencheikh El-Fegoun estime que les RCB sont "un espace de liberté et de qualité". Le film, fini en octobre 2017, a été projeté dans plusieurs pays et a obtenu de nombreux prix dans des festivals internationaux. À ce propos, la réalisatrice a indiqué qu'"il est projeté en ce moment en Russie mais j'ai fait le choix d'être ici et de le porter. C'est dur, et cela me fait mal de ne pas pouvoir le partager avec les miens". Pour faire "exister" Fragments de rêves, El-Fegoun a lu un texte de son documentaire à l'assistance : "Et si nous commencions par exercer un droit dont on ne parle jamais, le droit de rêver. Les rêves seront nettoyés de tous les poisons, sauf de ceux qui émanent des craintes et des passions humaines (…). Les dirigeants politiques ne croiront plus que les pauvres aiment se nourrir de promesses. Personne ne sera pris pour un héros pour avoir fait ce qu'il estimait être juste (…). L'éducation ne sera pas le privilège de ceux qui peuvent payer. La justice et la liberté, condamnées à vivre séparées, se retrouveront et seront de nouveau soudées. Aux désespérés sera rendu l'espoir." La décision de l'association Project'Heurt's d'arrêter les RCB semble radicale pour certains. Mais la réaction est tout indiquée pour dénoncer une atteinte à la liberté d'expression et une "atteinte à la dignité", car en trois ans, c'est la deuxième fois que les organisateurs subissent la censure du ministère. À rappeler qu'en 2016, le documentaire Vote off de Fayçal Hammoum, qui devait être projeté en avant-première nationale aux Rencontres cinématographiques de Béjaïa, s'est vu aussi refuser le visa culturel. Cette commission de visionnage vient une fois de plus de noircir le paysage cinématographique algérien, qui déjà peine à voir le jour. Azzedine Mihoubi, qui prétend travailler à faire "redorer" le blason du 7e art du pays, vient de prouver une fois de plus que son institution joue plutôt au "bourreau" de la culture ! De notre envoyée spéciale à Béjaïa : Hana Menasria