Il ne resterait que l'annonce officielle du concerné lui-même pour mettre fin au faux suspense qui plombe la vie politique dans le pays. Après des mois d'atermoiements, d'allusions et parfois de diversions, la candidature d'Abdelaziz Bouteflika pour un nouveau mandat présidentiel se précise. À moins d'un imprévu, la marche vers "la continuité" de l'œuvre de celui qui a déjà battu le record de présence à la tête de l'Etat est quasiment actée. Les doutes se dissipent l'un après l'autre et l'affirmation de Djamel Ould Abbes, qui a indiqué dimanche à l'APN qu'"Abdelaziz Bouteflika est le candidat" de son parti au scrutin présidentiel de 2019, n'est, en fait, que la confirmation d'un faux suspense qui a commencé il y a de cela plusieurs mois. Les éléments de langage utilisés par les partisans de "la continuité" ne laissent plus de place au mystère. Avant la déclaration de Djamel Ould Abbes, désormais prise comme un acte de candidature par procuration (alors que la loi précise que la déclaration de candidature doit être faite par le candidat lui-même), le porte-parole du RND, Seddik Chihab, avait déjà donné le tempo à partir de Tizi Ouzou où il était en déplacement samedi. "Impossible de trouver un autre président de consensus autre que Bouteflika", avait-il assené. Pour le responsable du RND, tout comme pour ses alliés de la "majorité présidentielle", la candidature d'Abdelaziz Bouteflika est comme une fatalité. Nul autre homme ou femme ne trouve grâce aux yeux des partisans de la "poursuite de l'œuvre". Comme dans un orchestre, tous les soutiens de cette option exécutent leur part de la partition qui mène vers le maintien du statu quo. Quitte à plomber une classe politique déjà réfractaire à l'idée de voir le chef de l'Etat rempiler pour un nouveau mandat à la tête de l'Etat. "Au lieu de se retirer, l'opposition doit présenter un candidat de consensus", répondait un jour Belkacem Sahli, président de l'ANR, sur un plateau de télévision. L'état de santé de Bouteflika, un détail ? Si la candidature d'Abdelaziz Bouteflika est quasiment une certitude, le timing choisi pour l'annoncer impose des questions. Car, à six mois du scrutin, cette annonce risque de tuer encore d'avantage les rares espoirs qui restaient quant à la possibilité de voir le chef de l'Etat renoncer à une nouvelle candidature. D'autant plus que pour les élections précédentes, le chef de l'Etat avait toujours pour habitude de laisser cette annonce jusqu'à quelques semaines du scrutin. En 2004 et 2009, c'est Abdelaziz Bouteflika en personne qui avait annoncé son désir de "continuer l'œuvre" dans des shows organisés respectivement à l'hôtel El-Aurassi et à la Coupole du complexe olympique. Mais en 2014, affaibli par l'AVC qui l'avait touché une année auparavant, le chef de l'Etat n'a jamais rendu publique sa candidature. Il en avait laissé le soin à son directeur de campagne, Abdelmalek Sellal. C'était un jour de février lors d'un meeting animé à Oran. Au-delà de la forme et du timing, c'est surtout la manière avec laquelle les soutiens d'Abdelaziz Bouteflika vont mener la campagne présidentielle qui intrigue. Les supporters du chef de l'Etat ne se gêneront pas de faire campagne à sa place, comme ils l'ont déjà fait par le passé. C'était d'ailleurs le cas il y a 4 ans et demi. Mais lors du précédent scrutin, le chef de l'Etat avait fait des efforts surhumains pour la prestation de serment. Pourrait-il honorer cette obligation constitutionnelle, lui qui ne s'est pas adressé aux Algériens depuis avril 2012 ? La question ne semble pas embarrasser, outre mesure, les partisans de la "poursuite de l'œuvre". Ali Boukhlef