Le Chef du gouvernement, Ahmed Ouyahia, se rendra en visite officielle au Maroc durant le mois en cours, après le 20 probablement. Des sources diplomatiques confirment ce déplacement qui interviendra, selon elles, “dans les semaines à venir”, soit pendant ce mois de juin. Le Premier ministre sera à la tête d'une délégation ministérielle composée, entre autres, des responsables des départements de l'Intérieur et des Affaires étrangères. Programmé après le passage du roi Mohammed VI à Alger à l'occasion du dernier Sommet arabe tenu au mois de mars dernier, le séjour de M. Ouyahia semblait compromis suite aux nouvelles divergences exprimées de part et d'autre à propos du règlement du conflit du Sahara occidental. La réaffirmation par le président Abdelaziz Bouteflika du droit à l'autodétermination du peuple sahraoui avait grandement irrité Rabat, au point de conduire le souverain alaouite à bouder le sommet de l'Union du Maghreb arabe (UMA) qui devait se tenir le mois dernier à Tripoli. Cette désaffection, intervenue après les grandes retrouvailles de Zéralda des dirigeants des deux pays, a jeté un froid dans les relations bilatérales. Les accusations proférées par la presse marocaine quant à l'implication d'Alger dans les manifestations des populations sahraouies, qui ont secoué ces derniers jours plusieurs villes du royaume, ont accentué le climat de tension. Cependant, en dépit de cette crispation de façade, le processus de normalisation est bel et bien enclenché. Le maintien du séjour de M. Ouyahia au Maroc est l'expression de la détente. C'est la première fois, en effet, depuis les attentats de Marrakech en 1994 ayant conduit à la fermeture des frontières entre les deux pays, qu'un Premier ministre algérien foule le sol marocain. Jusque-là, les visites, somme toute rares, se limitaient au niveau ministériel et des experts. L'été dernier, le chef de la diplomatie du royaume, Ahmed Benaïssa, était l'hôte d'Alger. Sa venue devait servir de prélude à celle du Chef du gouvernement Driss Djettou. Toutefois, une énième brouille, suscitée comme à l'accoutumée par le contentieux du Sahara occidental, avait entraîné l'ajournement d'une telle visite. Grâce à ce genre d'initiatives, suggérant sa volonté de rapprochement, Rabat estimait qu'il était possible d'amener Alger à la table des négociations sur le sort du Sahara. De son côté, la suppression du visa aux ressortissants algériens avait comme contrepartie la réouverture par l'Algérie de la frontière terrestre. S'il a attendu une année avant d'annuler à son tour le visa aux Marocains, notre pays n'entend guère rouvrir la frontière dans l'immédiat. De même, il persiste à dissocier le contentieux du Sahara du destin des relations bilatérales. C'est à cette condition que les autorités ont accepté de relancer le travail des deux commissions mixtes, il y a une année. Néanmoins, dans les faits, ces ateliers chargés des questions consulaires et économiques travaillent encore épisodiquement. Leurs activités étant rompues à chaque nouvelle escarmouche diplomatique. Samia LOKMANE