La Turquie dispose de preuves, notamment d'un deuxième enregistrement audio, contredisant la version donnée jeudi par le procureur saoudien sur le meurtre à Istanbul du journaliste, Jamal Khashoggi, a affirmé hier un journal turc. Le procureur général saoudien a requis jeudi la peine de mort contre cinq accusés pour leur rôle dans le meurtre de Jamal Khashoggi, affirmant que le journaliste avait été drogué, tué et démembré au consulat de son pays à Istanbul le 2 octobre, mais le royaume a totalement dédouané le prince héritier Mohammed ben Salmane, dit MBS. Selon le procureur saoudien, une équipe a été dépêchée à Istanbul avec pour mission de ramener le journaliste de gré ou de force à Riyad, mais son chef a pris sur place la décision de le tuer sans consulter ses supérieurs. Il a affirmé que le journaliste avait alors été drogué et démembré dans la mission diplomatique et que ses restes avaient ensuite été remis à un collaborateur à l'extérieur du consulat. Sur un total de 21 suspects, le procureur général a inculpé à ce jour 11 personnes et requis la peine capitale pour cinq d'entre elles, d'après la même source, sans rendre publique leur identité. Le chef de la diplomatie saoudienne, Adel al-Jubeir, a déclaré pour sa part que son pays refusait l'enquête internationale demandée mercredi par Ankara, et affirmé lui aussi que le prince héritier n'avait rien à voir avec le meurtre. Mais l'influent éditorialiste Abdulkadir Selvi, proche du pouvoir, a affirmé hier dans le quotidien Hürriyet qu'un enregistrement sonore du meurtre dont disposent les autorités turques montrait qu'aucune tentative de négocier avec Khashoggi pour le persuader de rentrer en Arabie n'avait eu lieu. Selon lui, le journaliste n'a pas été drogué mais étranglé ou étouffé à l'aide d'une corde ou d'un sac en plastique. D'après M. Selvi, les services turcs sont également en possession d'un deuxième enregistrement sonore de 15 minutes réalisé avant le meurtre, qui ne laisse aucun doute sur le caractère délibéré du crime. "Dans cet enregistrement, on entend l'équipe saoudienne en train de discuter de la façon d'exécuter Khashoggi, passer en revue son plan préparé à l'avance et rappeler à chacun de ses membres son rôle", selon M. Selvi. "Des preuves ont également été recueillies après le meurtre, sous forme d'appels téléphoniques à l'international effectués par l'équipe saoudienne", a ajouté l'éditorialiste. La Turquie avait jugé, jeudi, par la voix de son chef de la diplomatie, Mevlüt Cavusoglu, insuffisantes les explications fournies par le procureur saoudien. Le président turc Recep Tayyip Erdogan a, plusieurs fois, affirmé que l'ordre de tuer Khashoggi avait été donné aux plus hauts niveaux de l'Etat saoudien. Il a écarté la responsabilité du roi Salmane, mais la presse et des responsables turcs anonymes ont incriminé son fils, le prince Mohammed. R. I./Agences