Au pouvoir depuis presque trois décennies, Omar al-Bachir accuse la "main de l'étranger" d'être derrière les manifestations qui ne sont en réalité que l'expression d'un ras-le-bol social des Soudanais, comme cela est le cas dans plusieurs pays du continent africain. De nouvelles manifestations, placées sous le slogan "Convoi de janvier" ont eu lieu hier après-midi à Khartoum et dans plusieurs autres villes du Soudan, où la colère sociale s'est transformée en combat politique contre le régime d'Omar al-Bachir, depuis maintenant trois semaines. Des journaux indépendants et des militants, ainsi que des citoyens ont affirmé que les forces de sécurité ont usé des tirs à balles réelles, pour empêcher les manifestants d'atteindre le palais présidentiel à Khartoum. Sur les vidéos postées sur les réseaux sociaux, l'on pouvait remarquer le chaos qui régnait hier dans la capitale, en raison de l'usage des gaz lacrymogènes contre la foule des manifestants qui réclament depuis la mi-décembre dernier le départ d'Omar al-Bachir du pouvoir. Organisée à l'appel du Syndicat des professionnels, qui réunit plusieurs corps de métiers au Soudan, la manifestation d'hier a enregistré de nombreux blessés, mais aucun bilan n'était disponible en fin de journée. Les services de sécurité ont procédé également à de nombreuses arrestations parmi les manifestants, mais aussi parmi des figures de l'opposition politique, des médias et des mouvements de la société civile. Des professeurs d'université, ayant affiché ouvertement leur soutien à ce qui est appelé le "Mouvement du 27 novembre", ont également été arbitrairement interpellés par les forces de sécurité, a rapporté le journal al-Tiyar. "Au moins 14 professeurs d'université ont été arrêtés à Khartoum", a précisé le quotidien local Rakoba News. Tout en jouant l'apaisement, le président Omar al-Bachir a décidé de ne pas céder à la pression de rue et use de la force publique de manière disproportionnée, comme le montrent les nombreuses vidéos diffusées sur la Toile. Omar al-Bachir accuse Israël d'être derrière cette vague de colère citoyenne qui a commencé fin novembre dernier de manière spontanée après l'augmentation du prix du pain. Le président soudanais, au pouvoir depuis 29 ans, a tenté aussi de calmer la colère de son peuple en limogeant son ministre de la Santé, auquel il reprochait, selon les médias locaux, la flambée des prix des médicaments. Visiblement aux abois, M. al-Bachir a mobilisé ses partisans qui ont appelé hier à une marche de soutien pour mercredi, ont ajouté les journaux locaux. Pour rappel, au moins 37 personnes ont été tuées depuis décembre dernier, lors des manifestations qui se sont propagées à travers tout le pays, selon les chiffres de l'opposition et des ONG internationales. Les autorités affirment, quant à elles, que le bilan des morts est de 19 victimes, dont deux policiers. Ceci sans compter les centaines d'arrestations opérées dans les milieux de l'opposition et des médias, ainsi que la fermeture de nombreux journaux qui ont soutenu ce mouvement populaire. Lyès Menacer