La colonisation aura créé le paradoxe d'un Etat musulman exportateur de vin. La vigne reste la culture d'exportation par excellence à Mostaganem. On connaît son importance dans la vie sociale. Son pouvoir multiplicateur est considérable : en amont, elle demande des machines, des produits chimiques pour la culture et la vinification ; en aval, elle alimente des “industries” qui fabriquent de l'alcool. La commercialisation des vins exige un réseau d'intermédiaires spécialisés et la direction des fermentations suppose un matériel et une technique, c'est-à-dire une formation professionnelle que les anciens ouvriers agricoles n'ont pas. Les pouvoirs publics ont dû procéder en hâte à la remise en état des installations et à la formation d'un personnel qualifié de cavistes et de vinificateurs. Cependant, le potentiel de production est en baisse. De nombreuses vignes sont épuisées avant l'âge. La viticulture à Mostaganem est condamnée à des crises. N'y aurait-il pas intérêt à envisager la reconversion d'une grande partie des terres consacrées à la vigne ? Les plaines du Dahra pourraient porter des cultures fruitières, fourragères ou industrielles de coton ou de betterave sucrière. Mais seule l'irrigation généralisée pourrait permettre des cultures de remplacement aussi rentables que la vigne. Cette nécessaire reconversion est timidement amorcée. Mais tout cela ne suffit pas à procurer des salaires à la population en augmentation continue, surtout celle qui vit dans des conditions matérielles difficiles. Les activités marginales s'y multiplient : petits métiers, petits commerces installés sur les places publiques ou sur les trottoirs, les rues encombrées d'une foule oisive. Le chômage et le sous-emploi frapperaient le tiers de la population. Mostaganem ressemble à une ville d'un pays sous-développé qui s'hypertrophie sans pouvoir offrir un emploi à ceux qu'elle attire. DAHANE MOHAMED