Méthodes archaïques, lenteur dans le traitement des dossiers et crédits nettement limités. C'est le parcours du combattant des jeunes investisseurs en quête de crédits bancaires pour lancer leurs affaires. Selon un cadre de la BNA, “alors qu'à travers le monde, les opérations bancaires s'effectuent en temps réel, les délais en Algérie sont relativement longs, ce qui explique le désarroi des investisseurs potentiels”. Cependant, un reproche très régulier est émis autant par les banquiers que par les emprunteurs : la parcimonie dans l'octroi des crédits aux opérateurs privés. Des responsables d'institutions bancaires englobant les wilayas d'Oran, de Aïn Témouchent, de Mostaganem et de Tiaret soulignent toutefois l'extrême disparité des situations rencontrées par chacune des banques publiques, manière de dire que les problèmes sont bel et bien réels. Dans ce contexte, des banquiers se plaignent des jeunes investisseurs peu empressés à rembourser leurs créances dans les délais impartis par les clauses bancaires. “Ce retard dans le recouvrement des prêts pénalise d'autres postulants dont les dossiers sont en instance depuis des mois”, précise nos interlocuteurs. de 1996 à 2002, des banquiers à l'ouest du pays affirment avoir donné leur aval à 497 projets d'investissements de jeunes opérateurs pour l'équivalent de 45 milliards de dinars touchant aux secteurs de l'agroalimentaire, de la communication et du transport avec un pic de l'ordre de 16 milliards de dinars pour ce dernier secteur. “Il y a 6 ans, indiquent-ils, le financement des jeunes investisseurs représentait 70% de nos activités. Cette part est tombée à 35% et nous envisageons de descendre à 20% d'ici à 5 ans pour amortir nos recouvrements.” Le mot est lâché et il faut qu'on s'y arrête. Sur les 497 projets financés par la BDL, la BEA et la BNA, plus de la moitié d'entre eux n'ont pas été remboursés par les emprunteurs, alors que 15% ont cessé de “donner signe de vie”, formule usitée dans le jargon des milieux financiers pour désigner des investisseurs malhonnêtes. Comprendre par là la “disparition” de plusieurs emprunteurs qui ont préféré fuir que d'avoir à rembourser l'argent de l'Etat. Une situation pour le moins cocasse dans la mesure où les poursuites judiciaires ne servent plus à grand-chose. “Comment voulez-vous mettre la main sur les mauvais créanciers alors qu'aucune mesure coercitive n'existe dans la législation algérienne. Ce vide juridique nous phagocyte. Serait-ce une omission de la part des ministères de tutelle qui ne s'emploient pas assez rapidement à transformer réellement l'environnement bancaire national en le rendant plus professionnel ?”, s'interroge un cadre financier de la BNA. Répondant au mois de décembre 2002 au cri d'alarme de certaines banques publiques sur la non-efficience du recouvrement des prêts non remboursés, le ministre des Finances a reconnu que, pour remédier à son caractère désuet et rigide, le secteur bancaire a “besoin d'une redynamisation par l'intervention dans la marché de nouvelles institutions privées, nationales et/ou étrangères”. Avec la revitalisation du système bancaire en 1999, cinq établissements (Mouna bank, Banque commerciale et industrielle d'Algérie (BCIA), Khalifa bank, la Compagnie algérienne de la banque et Rayan bank) décident de passer à l'action en proposant des crédits destinés à l'investissement en usant de mesures drastiques. “Les candidats à l'investissement se plaignent du cheminement administratif de leurs demandes de prêts. Après leur dépôt dans une banque publique, les dossiers mettront 10 mois avant d'atterrir à la direction générale où ils dormiront dans les tiroirs”, avoue crûment un responsable de la BCIA. Et d'ajouter : “Chez nous, nous traitons les dossiers d'investissement de manière professionnelle, selon des procédés modernes grâce à la mise en place d'un système de télétransmission pour l'émission d'une messagerie interbancaire, donc avec un risque de zéro bloquant au recouvrement de nos créances...” Pour mettre un terme à la politique populiste des banques publiques, des observateurs insistent sur la nécessité de créer un Fonds national qui prendra en charge les préoccupations des jeunes. “Des expériences de ce genre ont été couronnées de succès dans les pays voisins, comme la Tunisie, où des Fonds spéciaux sont financés par le Trésor public afin de venir en aide aux jeunes dans la perspective de programmes d'emploi élaborés par le gouvernement.” Ainsi, devant le vide juridique rencontré par l'ensemble des banques publiques, il s'agit surtout de développer une prospective efficace pour le recouvrement des créances qui s'élèvent à quelque 400 milliards de centimes. B. G.