Une aube grisâtre et glaciale se levait sur la ville, alors que le muezzin appelait à la prière. Une forme se faufile à pas de loups à travers les ruelles de la banlieue. Une femme voilée s'arrête à l'orée d'un pâté de maisons. Sans trop hésiter, elle dépose un carton devant l'une d'elles et s'empresse de sonner, avant de quitter hâtivement les lieux. Faïza ouvrit les yeux. Elle émergeait d'un beau rêve, et se demanda qui avait bien pu la réveiller à cette heure matinale. Un coup d'œil à son radioréveil lui confirme qu'on était à l'aube d'une nouvelle journée. Elle s'étire et s'assoit dans son lit en jetant un coup d'œil à son mari. Hichem n'avait pas le sommeil aussi léger que le sien et n'a sûrement rien entendu. Le chien se met à aboyer dans la cour. La jeune femme se lève et jette un coup d'œil par la fenêtre. La rue était déserte et une pluie fine s'était mise à tomber. Elle frissonne et retourne dans son lit. Cependant, quelque chose en elle lui suggérait de se lever et de descendre au rez-de-chaussée. Excédée, elle enfile sa robe de chambre et ses pantoufles et décide d'aller voir ce qui se passait. Le chien n'arrêtait pas d'aboyer. Un des enfants s'était-il levé ? Etait-il malade ? Pour se rassurer, elle passe devant la chambre des garçons et ouvre la porte, ses trois fils étaient bien là, calés dans leurs lits, et bien emmitouflés dans leurs chaudes couettes. Elle referme tout doucement la porte et se met à descendre les marches d'escalier en soupirant. Il était encore trop tôt pour entamer la journée ! Elle se rend dans la cuisine et dépose une cafetière sur la gazinière, avant de découper quelques tranches de pain pour les enfourner. Les aboiements du chien reprennent de plus belle. N'y tenant plus, Faïza quitte la cuisine à grands pas, traverse le salon et ouvre tout grand le portail. Elle allume la lampe du seuil et constate qu'un carton était déposé à quelques mètres d'elle. Curieuse, elle s'en approche, et y jette un coup d'œil, avant de reculer effarée. Le froid la fera frissonner. Elle passe une main sur son bras, puis prend une lente inspiration, avant de faire quelques pas vers le carton. Un bébé d'à peine quelques jours dormant paisiblement, y était déposé, avec quelques affaires. La jeune femme se demande si elle ne ferait pas mieux d'appeler tout de suite la police, mais son instinct maternel, reprenant le dessus, elle décide tout d'abord de mettre le nouveau à l'abri du froid et de la pluie. S'emparant du carton, elle revient chez elle et referme la porte, puis se dirige vers la cuisine, et dépose son fardeau sur la table. Elle soupire : ce pauvre enfant est sûrement le fruit d'un acte illégitime, et la personne qui a consenti à s'en séparer, ne doit être qu'une malheureuse fille célibataire. Ces choses deviennent très courantes de nos jours. Mais enfin, pourquoi n'a-t-elle pas laissé son bébé à la maternité, où il aurait été tout bonnement remis à l'assistance sociale ? Elle secoue la tête. Cette fille n'avait peut-être pas l'intention de se séparer de son enfant. Cependant, n'ayant sûrement aucune ressource, elle avait fini par opter pour la seule solution qui se présentait à elle : se débarrasser du bébé en le déposant au hasard devant le portail de la première maison du quartier. Faïza comprit aussi que c'est la sonnette de la porte qui l'avait réveillée. Cette mère s'inquiétait pour son nouveau-né et voulait qu'on le mette à l'abri. (À SUIVRE) Y. H.