"Un comité d'experts de très haut niveau devrait être mis en place, dès à présent, pour superviser l'économie et éviter une récession", a préconisé hier l'expert en finances, Lachemi Siagh, lors de son intervention au Forum du quotidien Liberté. Ce comité, a-t-il insisté, doit être installé sans plus attendre, avant même le processus de transition politique car, a-t-il estimé, "il y a un travail urgent à mener pour empêcher l'effondrement de l'économie nationale". Selon lui, ce comité d'experts devra avoir toute latitude pour analyser les données liées aux ressources financières du pays, avant de s'atteler en urgence à la conception de réformes structurelles dès le début même de la transition. Soulignant que la tâche qui attend le prochain gouvernement au plan économique "ne sera pas une sinécure", Lachemi Siagh a tenu à rappeler qu'il est d'autant plus urgent de mettre en branle ces réformes structurelles d'autant que celles-ci, une fois lancées, mettent naturellement du temps pour donner les résultats escomptés. Dès lors, a-t-il recommandé, "il faut agir très rapidement, vu que le FMI est déjà presque à nos portes". Les réserves officielles de changes, a-t-il relevé en ce sens, s'épuisent très vite et leur stock doit sans doute être bien moindre que les 80 milliards de dollars évoqués dernièrement, une partie de cette épargne ayant été déjà injectée ces quelques derniers mois dans l'économie. Aussi, a-t-il alerté, des problèmes urgents risquent de venir peser sur la solvabilité du pays, d'autant qu'il était déjà difficile, au moment du recours au financement interne par la planche à billets, d'aller "emprunter sur les marchés internationaux, vu la réalité de l'économie algérienne et la faiblesse de ses capacités de remboursement". Dans cet ordre d'idées, il est nécessaire, a réitéré l'expert en finances, de faire rapidement face aux urgences économiques, afin d'éviter notamment "une chute brutale de la valeur du dinar, qui est en réalité surévalué", au regard de la réalité défavorable des fondamentaux de l'économie nationale. De plus, a-t-il dit, "il faut surveiller les transferts de devises" et œuvrer rapidement à "créer des mécanismes efficaces pour mobiliser l'épargne qui existe à l'étranger", à travers une modernisation financière et l'ouverture d'agences bancaires afin de captiver la diaspora algérienne. "Il y a des choses très simples à faire", explique ainsi Lachemi Siagh, tout en évoquant cependant la nécessité de réformer la gouvernance économique et d'ouvrir rapidement des chantiers des réformes structurelles, autrement plus névralgiques et plus délicats. "On ne peut pas maintenir la même politique de subventions publiques appliquée ces dernières années", a-t-il plaidé en ce sens, ajoutant qu'il faut aller vers un ciblage de ses dispositifs de soutien selon les besoins des différentes catégories sociales. De même, a-t-il encore mis en évidence, la règle dite des 51-49% qui régit l'investissement étranger, "n'a fait que chasser les investisseurs sérieux", suggérant par là un réaménagement urgent de cette mesure afin d'inciter les grandes entreprises étrangères à venir investir en Algérie. Au plan de la politique fiscale, Lachemi Siagh a préconisé notamment le lancement d'une vaste démarche de réforme qui passerait surtout par une "informatisation très large de la gestion des impôts", ce qui constituerait, a-t-il fait valoir, le moyen le plus évident "de prendre le taureau par les cornes pour lutter efficacement contre l'économie et le marché informels, même si cela doit toucher à beaucoup d'intérêts", a-t-il tenu à avertir. Et d'évoquer enfin l'absence très dangereuse de "garde-fous" pour contrôler les recours à la planche à billets, alors que selon lui, le rythme de l'inflation serait déjà bien plus élevé en réalité que ce que peut indiquer le panier de consommation pris en référence dans l'élaboration des chiffres officiels. Akli Rezouali