Le gouvernement semble vouloir déclarer la guerre aux trafiquants en particulier de drogue, de cigarettes, de carburants à travers des dispositions telles que l'aggravation des peines d'emprisonnement à l'encontre des contrebandiers, contenues dans la loi de finances complémentaire 2005. Très à l'aise, le ministre des Finances, M. Mourad Medelci, a présenté dans une conférence de presse, tenue hier, les nouvelles dispositions de la loi de finances complémentaire 2005. Il s'agit principalement de mesures contre la contrebande et d'actions d'assainissement des circuits de l'importation. Ce qui est nouveau, c'est que pour faire dans l'importation de produits destinés à la revente en l'état (produits finis), il faut se constituer en société dotée d'un capital minimum de 2 milliards de centimes. Le grand argentier du pays justifie ainsi la mesure : il y a aujourd'hui 40 000 importateurs dont 9 000 de personnes physiques (particuliers). Parmi cette catégorie, il s'agit souvent d'importateurs qui disparaissent sans laisser de trace. “On n'arrive pas à les retrouver”. En un mot, ils se volatilisent grâce à des registres du commerce fictifs. Désormais, c'est aussi après vérification de la présence de local, de surcroît adapté à la nature du produit importé, que ce type d'opérateur pourra exercer son activité. Ces mesures seront appliquées à partir de janvier 2006. Ces importateurs ont cinq mois pour se conformer à cette nouvelle réglementation. Ces mesures sont dictées par le souci de professionnaliser l'activité d'importation. À des fins statistiques, la loi de finances complémentaire prévoit, du reste, que pour toute domiciliation bancaire, l'importateur doit payer une taxe de 10 000 dinars. Ce qui est nouveau également, c'est l'aggravation des peines d'emprisonnement à l'encontre des contrebandiers. “Gare à celui qui se fait prendre dans les filets du contrôle !” En effet, la loi de finances complémentaire 2005 prévoit un système de sanctions, à l'encontre des contrebandiers, qualifié par le ministre d'extrêmement lourd. Lorsqu'il s'agit d'un acte de contrebande utilisant des armes à feu et des moyens de transport (animaux ou véhicules), la peine d'emprisonnement est portée à 10-20 ans (dans le code de douane actuel 6 mois à trois ans). Dans un acte de contrebande où sont associées trois personnes et plus, la peine d'emprisonnement passe dans la loi de finances complémentaire de 2 à 10 ans, contre 3 à 18 mois dans le code de douane actuel. Pour un acte de contrebande simple, la réglementation actuelle prévoit un emprisonnement de trois mois. Dans la loi de finances complémentaire, la peine s'avère plus lourde : 1 à cinq ans d'emprisonnement. C'est une déclaration de guerre qui ne dit pas son nom contre les contrebandiers dont les plus nocifs sont ceux de la drogue, des cigarettes, des carburants et les soi-disant exportateurs illégaux de cheptels. De même, les saisies douanières ne seront plus vendues aux enchères. Elles seront soit détruites, soit offertes aux institutions publiques et à la Défense nationale. Cette mesure, contenue dans la loi de finances complémentaire, est destinée à empêcher que ces saisies ne réalimentent le trafic. Une pratique, constatée et imputée à certains douaniers, semble suggérer le premier responsable du département des Finances. Interdiction de l'importation de véhicules en référence à la date d'arrivée au port Le ministre des Finances a confirmé l'information rapportée par Liberté. La loi de finances complémentaire 2005 accorde un sursis de deux mois aux particuliers et autres importateurs, à partir de la publication de l'ordonnance portant sur ce texte dans le Journal Officiel. Fin septembre 2005, voire en octobre prochain, l'importation de véhicules de moins de trois ans sera interdite. “Nous allons demander aux transporteurs publics, tels que la Cnan, de ne pas embarquer ces véhicules à partir de la date-butoir”. La date qui fera référence pour la douane est la date d'arrivée aux ports algériens et non la date d'embarquement du véhicule, a précisé le ministre. Soit deux mois après la publication de l'ordonnance portant loi de finances complémentaire. Les anciens moudjahidine continueront à pouvoir importer un véhicule neuf tous les cinq ans. Par ailleurs, le ministre a indiqué que le gouvernement compte imposer un cahier des charges pour les concessionnaires automobile (qui importent essentiellement des véhicules neufs), pour éviter toute situation monopolistique ou tout corporatisme, au détriment de la qualité de la prestation à la clientèle. Le dinar s'est apprécié : les prix des produits de large consommation vont baisser Le ministre a ajouté que le budget inhérent à la loi de finances complémentaire est établi sur la base des paramètres suivants : un baril à 19 dollars, un taux de change de 73 dinars pour un dollar et un taux d'inflation de 3,5% (hausse des prix) une croissance de 5,4%. Le ministre n'a pas caché que les sommes énormes qui seront engagées au cours du plan de relance, 55 milliards de dollars, risquent d'avoir des effets inflationnistes. Selon lui, deux effets modérateurs vont permettre de contenir la hausse des prix : l'impact de la suppression des droits de douane sur 2 300 produits à partir de septembre prochain et l'appréciation du dinar par rapport au dollar. La conjoncture permet d'anticiper un taux de change de 73 dinars pour un dollar d'ici à la fin 2005, contre 76 dinars auparavant. Ce renforcement du dinar, dû sans doute à l'appréciation du dollar face à l'euro et aux disponibilités en dollars plus importantes en Algérie, renforce la valeur de la monnaie nationale. Du coup, l'importateur déclarera sa marchandise à un taux de change plus favorable. Ce qui implique en principe une baisse des produits de large consommation importés. Enfin, n'oublions pas que la loi de finances complémentaire comporte une programmation des dépenses relatives au plan de relance économique. Dans la réponse du ministre à ce sujet, l'Algérie, grâce aux excédents du fonds de régulation — 900 milliards de dinars à juin 2005 — a de quoi faire face aux besoins de financement du plan de relance jusqu'en 2007, même si le baril descend à 19 dollars. Le ministre a observé que cette année est exceptionnelle. Le surplus accumulé par le fonds va encore augmenter de façon significative d'ici à la fin de l'année. Ce scénario de cours baissier a de faibles chances de se réaliser, notons-le, tant les experts s'accordent à pronostiquer un cycle à prix du baril élevé à court et moyen terme. Les regards seront plutôt braqués sur l'efficacité des dépenses colossales engagées au cours de ce plan, en particulier leur impact sur l'amélioration des conditions des Algériens. N. Ryad