La ville de Béjaïa a été, jeudi dernier, le théâtre d'une imposante marche contre le système, improvisée par des milliers de travailleurs issus principalement des différentes institutions publiques qui étaient déjà paralysées par une grève générale depuis le dimanche 7 avril. Il était 11h30 lorsqu'une immense foule, rassemblée sur l'esplanade de la maison de la culture Taos-Amrouche, a initié cette énième démonstration de rue pour dénoncer le "coup de force" du pouvoir qui cherche à gagner du temps afin de pérenniser le régime politique en place depuis 57 ans. Quelques minutes après l'entame de la marche, les rangs de la foule se verront grossir avec l'arrivée de centaines d'étudiants et d'enseignants de l'université Abderrahmane-Mira, mais aussi d'autres militants et citoyens lambda. "Système dégage !", "Bensalah, démissionnez", "Yetnahaw gaâ, gaâ !" (Dégagez tous !), "Le peuple n'est pas dupe, M. Gaïd Salah", "Le peuple veut le départ de tout le système"…, sont là les principaux slogans scandés par les manifestants, hier, dans les rues de Béjaïa. Brandissant l'emblème national, le drapeau amazigh, des banderoles et des pancartes reprenant les mots d'ordre de la manifestation, les marcheurs ont eu à sillonner le boulevard de la Révolution s'étendant du carrefour d'Aâmriw jusqu'au rond-point de Nacéria, avant de parcourir la rue de la Liberté, en passant devant le siège de la wilaya, pour arriver enfin à la place de la liberté d'expression Saïd-Mekbel, point de chute de la marche. Plusieurs fonctionnaires de l'Etat, notamment ceux relevant des secteurs des finances (banques, Trésor public…), du ministère du Travail, de l'Emploi et de la Sécurité sociale (Ansej, Cnac, Angem, Anem, Cnas…), du ministère de l'Habitat (Enpi, Opgi…), des collectivités locales etc., ont arboré tout au long de leur parcours, des banderoles réaffirmant leur engagement et leur détermination à rester mobilisés aux côtés du peuple algérien qui réclame pacifiquement le départ inconditionnel du système. Les manifestants qui se sont donné rendez-vous pour la marche de ce 8e vendredi de mobilisation contre le système, n'ont pas cessé de clamer haut et fort "Bensalah dégage !", "Son excellence le peuple vous dit : partez tous !". Notons que cette manifestation de rue a été ponctuée par une grève entamée dimanche dernier. Outre les administrations publiques, de nombreuses entreprises publiques économiques, à l'instar du port (EPB) et sa filiale BMT, la direction régionale de Sonatrach, la SDE (ex-Sonelgaz), les agences postales, les Actel (Algérie Télécom), les banques étatiques…, ont été paralysées par ce mouvement de grève. "Les tenants du pouvoir doivent savoir que le peuple algérien s'est réveillé et a décidé d'en découdre avec ce système. Nous disons à Gaïd Salah qui nous parlait de bande de malfaiteurs (issaba), que Bensalah en fait partie. Ce dernier était déjà au pouvoir avant même l'arrivée de Bouteflika en avril 1999. Nous voulons du sang neuf. Un changement radical du système s'impose. Ce qui exige le départ de l'ensemble des dignitaires du régime", nous dira le militant syndicaliste Rabah Rezgui, ancien cadre du MDS, à l'issue de cette marche qui s'est déroulée dans le calme. KAMAL OUHNIA