La population vient de nouveau, malgré les menaces, les provocations qui se multiplient désormais et les manipulations, comme cette curieuse évocation de terroristes infiltrés, apporter sa réponse cinglante : elle n'est pas près de lâcher la proie pour l'ombre. Malgré quelques appréhensions liées aux velléités répressives affichées par les tenants du pouvoir durant la semaine, le huitième vendredi de la contestation des Algériens n'a pas dérogé à la règle : la mobilisation est demeurée intacte. Hier encore, ils étaient des millions à défiler dans de nombreuses wilayas du pays pour réclamer le départ du système et de tous ses symboles. À Alger — qu'on a tenté d'isoler du reste du pays à travers de nombreux barrages filtrants dressés à la périphérie —, plusieurs dizaines de milliers de personnes ont envahi les principales artères du centre-ville pour exprimer leur rejet, non seulement du chef d'Etat intérimaire, mais également de Gaïd Salah, de Bedoui et de Belaïz. "Le peuple veut que vous partiez tous", scandaient les manifestants. "RND + FLN+gang=dégagez", "On a gagné le match, mais Gaïd Salah a vendu le match" étaient inscrits sur deux banderoles déployées par des jeunes, tout près de la Grande-Poste. Cette nouvelle démonstration de force des Algériens traduit incontestablement leur refus irrévocable de la "feuille de route" telle que concoctée par les décideurs de l'ombre et défendue par Ahmed Gaïd Salah. Mercredi, à Oran, le vice-ministre de la Défense a, en effet, qualifié de revendications "irréalisables" les aspirations réclamées par la population, celles de l'organisation d'une période de transition sans les figures honnies du régime. Mais ce vendredi, la population est venue, de nouveau, malgré les menaces, les provocations qui, désormais, se multiplient et les manipulations, signe du profond désarroi du régime, comme cette curieuse évocation de terroristes infiltrés, apporter sa réponse cinglante : elle n'est pas près de lâcher la proie pour l'ombre. Abdelkader Bensalah, désavoué, va-t-il finir par rendre son tablier ? Que fera Gaïd Salah maintenant que les Algériens lui signifient clairement qu'il est sommé de revoir sa copie ? Bedoui va-t-il se maintenir contre vents et marées, lui qui a été encore une fois brocardé ? S'il est difficile d'anticiper sur la manière dont la situation pourrait évoluer, il demeure certain, au regard des heurts qui ont caractérisé la fin de la marche d'hier à Alger, conjugués aux multiples signes d'une volonté d'une reprise en main par la force, que le pouvoir, irrémédiablement hostile à un changement en dehors de son canevas, mise sur l'essoufflement et sur d'éventuels dérapages. Un pari risqué, voire dangereux, pour le pays. Car il est invraisemblable d'aller à des élections sans le… peuple ! Mais assurément, Gaïd Salah, tout comme les résidus du régime de Bouteflika, sont sur des charbons ardents.