C'est ce que nous étions forcés de croire en visitant la cité des 194-Logements promotionnels à Aïn Benian. Les copropriétaires que nous avons rencontrés sur place ne savaient à quel saint se vouer. Déçus, ils ne s'attendaient certainement pas à vivre dans ces lieux où règne la désolation alors que les données fournies par l'Opgi de Bir Mourad Raïs relatives à la vente de logements promotionnels, à savoir le prix d'acquisition, le délai de réalisation, les caractéristiques des habitations, la description de l'environnement du site avec toutes les commodités (espaces verts, clôture de la cité, disponibilité de garages pour voitures…) étaient, à l'époque, fort alléchantes. En 1999, les copropriétaires, des universitaires en majorité, avaient en contrepartie de cette offre intéressante consenti chacun le sacrifice de débourser 400 millions de centimes pour y habiter. “Consacrer toutes nos économies et s'endetter pour pouvoir acquérir ces logements et habiter dans un endroit propre, calme, fleuri et surtout sécurisé, valent bien un tel sacrifice”, disent-ils. Malheureusement, la réalité est dure à accepter quand on a trop rêvé. “Rêvez au mieux, mais attendez-vous au pire”, dit un proverbe russe. Outre les retards énormes qu'ont connus les réalisations et les innombrables défauts qui ont contraint beaucoup d'entre eux à engager d'autres dépenses pour les rendre habitables, ils découvrent un endroit bien loin des hypothèses. Maladie, vol et agression Les chaussées sont impraticables et les trottoirs, non achevés, sont jonchés de sachets d'ordures, cailloux, cartons… La majorité des conduites des eaux usées sont défectueuses générant des conséquences néfastes et dangereuses (odeurs nauséabondes, prolifération de rongeurs, de moustiques et de mouches, sans compter les maladies graves et contagieuses). Les habitants sont cloîtrés derrière des barreaudages aussi fantaisistes que dissuasifs. Il faut dire que la sécurité n'a pas de prix ici compte tenu de l'absence de certains moyens. Pas d'éclairage public malgré l'existence de lampadaires qui semblent agrémenter le site sans toutefois l'éclairer une fois la nuit tombée. Les risques sont évidemment bien présents : vols de voitures, cambriolages, agressions physiques… Quant à la clôture de la cité, elle fait l'objet d'un conflit entre l'Opgi, qui a décidé de la réaliser, suite aux doléances des habitants, et l'APC, qui ne veut pas en entendre parler. Défoncée à plusieurs endroits pour des raisons que seuls les élus locaux peuvent expliquer, cette clôture a fini par perdre son utilité. Aujourd'hui, l'intimité de la cité est violée par des inconnus qui en font un passage mais surtout par des groupes de délinquants et toxicomanes qui n'ont aucun respect pour les familles résidentes. Le collectif de la cité a déjà attiré l'attention du wali d'Alger qui aurait effectué une visite surprise sur les lieux. “Pour sa part, le wali délégué de Chéraga qui a reçu des représentants de la cité, nous a assurés qu'il allait saisir les organismes concernés afin de prendre en charge les problèmes posés”, dira l'un des habitants. Ainsi, après avoir été érigée, la clôture, seul rempart contre l'intrusion des voyous et autres délinquants, a été démolie au grand dam des résidents. “Nous tenons à dire combien nous sommes écœurés, révoltés et touchés dans notre dignité suite à cette décision qui nous paraît, a priori, injuste, car l'auteur d'une telle mesure ne semble pas connaître les problèmes quotidiens que nous vivons”, écrivent-ils dans une requête adressée au ministre de l'Habitat. Risque et danger pour les familles Ils expliquent, en effet, que la cité est constamment traversée de jour comme de nuit par des personnes “douteuses” et “louches”. Elle est fréquentée par des jeunes désœuvrés qui s'adonnent à l'alcool et à la drogue et constitue un lieu de débauche sous le regard impuissant des copropriétaires. La cité est traversée en plus par des camions et des motocycles qui font un bruit assourdissant empêchant le repos et le sommeil des personnes âgées ou malades. “Ceux qui refusent la clôture de la cité veulent nous livrer à des risques certains dont les conséquences sont et seront encore dramatiques pour nos femmes, nos enfants et nous-mêmes, cadres toutes catégories confondues : militaires en activité et en retraite, sénateurs, députés, professeurs d'université, responsables en douane, médecins, architectes…”, soulignent-ils. Les plaignants soulèvent un autre point important, à savoir le devenir des garages se trouvant sous les immeubles. Destinés et compris dans le prix de l'acquisition du logement, ces garages ont été détournés de leur vocation. L'Opgi veut vraisemblablement les vendre comme locaux à usage commercial, ce qui révolte les copropriétaires. Ce qui est certain, c'est que ces garages ouverts aux grands vents sont dans un état d'insalubrité indescriptible. Certaines conduites des eaux usées communes apparentes sont détériorées charriant des saletés nauséabondes. Las d'essuyer une fin de non-recevoir de la part des responsables concernés, les requérants espèrent pour une dernière fois être entendus par un représentant du ministère de l'Habitat. Autrement dit, ils refusent de telles conditions alors que le prix de ces logements mérite une meilleure considération. A. F.