Le chef de l'Etat n'a pas fixé une échéance pour l'organisation de la nouvelle élection présidentielle. C'est un chef de l'Etat considérablement affaibli par la maladie, le crâne soudainement dégarni et le visage boursouflé qui est apparu à la télévision nationale jeudi soir pour annoncer la prolongation de son intérim jusqu'à l'élection d'un président de la République et réitérer son offre de dialogue à la classe politique et à la société civile dans le cadre de la préparation d'un nouveau scrutin présidentiel. Abdelkader Bensalah compte donc rester en poste au-delà de la limite légale de son intérim fixé à 90 jours, selon les termes de l'article 102 de la Constitution. L'annonce, la veille du seizième vendredi de manifestations, n'est guère une surprise, car dans son avis du 2 juin dernier, le Conseil constitutionnel l'a suggéré en soutenant que le chef de l'Etat devait rester en poste jusqu'au parachèvement du processus électoral. Comme justificatif à cette prolongation d'intérim, le chef de l'Etat a souligné que l'annulation du scrutin présidentiel du 4 juillet faute de candidats éligibles l'oblige "à continuer à assumer la charge de chef de l'Etat", sans toutefois fixer une échéance pour l'organisation du nouveau scrutin présidentiel. En prorogeant son intérim, le chef de l'Etat sort du cadre de la Constitution. C'est une solution politique complètement en déphasage avec les revendications du peuple et d'une grande partie de la classe politique, à savoir le départ de tout ce qui incarne le système et l'instauration d'une période de transition chapeautée par des personnalités intègres et crédibles en vue de la préparation d'un scrutin présidentiel transparent et démocratique. Bensalah, qui de plus appelle au dialogue, n'accompagne sa décision anticonstitutionnelle d'aucun geste d'apaisement, tels que la libération des détenus d'opinion, l'arrêt de la répression et les interpellations arbitraires lors des marches. Depuis de longues semaines, le chef d'état-major, Gaïd Salah, répétait qu'il ne fallait en aucun cas sortir du cadre constitutionnel. Mais cette fois-ci, la loi fondamentale, qui n'a pas prévu l'hypothèse d'une annulation d'une élection pour absence de candidats, n'offre plus aucune solution au régime. Le chef de l'Etat promet, par ailleurs, d'organiser une élection "sans perte de temps" tout en appelant à un dialogue inclusif. "J'invite la classe politique, la société civile et les personnalités patriotiques nationales, soucieuses du devenir de l'Algérie, à opter pour le dialogue inclusif en tant que voie menant à la participation au processus de concertation que l'Etat s'emploiera à organiser dans les meilleurs délais", a-t-il soutenu, ajoutant : "J'invite la classe politique, la société civile et les personnalités patriotiques nationales, jalouses du devenir de l'Algérie, à opter pour le dialogue inclusif en tant que voie menant à la participation au processus de concertation que l'Etat s'emploiera à organiser dans les meilleurs délais, à débattre de toutes les préoccupations portant sur la prochaine échéance présidentielle et, partant, tracer une feuille de route devant aider à l'organisation du scrutin dans un climat d'entente et de sérénité." Le système semble se diriger, encore une fois, vers un scrutin présidentiel sous son contrôle en tentant de trouver des interlocuteurs dans la classe politique susceptibles de crédibiliser cette démarche qui a échoué par le passé. Pour le chef de l'Etat, c'est au nouveau président de la République que revient la charge de mener des réformes politiques et socioéconomiques. "Ma conviction profonde est que seul le président de la République, élu démocratiquement, jouira de la confiance et de la légitimité requises pour lancer ces réformes et contribuer à relever les défis qui se posent à notre nation, d'où ma certitude que l'organisation d'une présidentielle dans des délais admissibles, sans aucune perte de temps, constitue l'unique voie et la plus efficace, politiquement et la plus rationnelle démocratiquement", a-t-il indiqué, tout en exhortant "tout un chacun à s'atteler sérieusement à la recherche de solutions consensuelles devant permettre l'organisation d'une élection présidentielle régulière dans un climat de rivalité".