Plusieurs dizaines d'avocats appartenant aux différents barreaux de l'Ouest algérien ont pris part, jeudi matin à Oran, à la marche régionale organisée à l'appel de l'Union nationale des ordres des avocats pour la libération des détenus politiques et pour l'avènement d'une justice libre et indépendante. En toges, brandissant l'emblème national et des banderoles de revendication, les manifestants ont battu le pavé entre la nouvelle cour de justice de l'USTO et le tribunal correctionnel de Cité Djamel en scandant des slogans appelant à la réhabilitation du métier d'avocat et l'application de la présomption d'innocence. Mais ils ont aussi appelé au départ du pouvoir en place, l'édification d'une république consacrant le respect des libertés individuelles et collectives, la séparation des pouvoirs et la souveraineté du peuple. Les manifestants ont également réagi au dernier discours du chef d'état-major, Ahmed Gaïd Salah, en exprimant leur attachement à un Etat civil et non militaire (dawla madania, machi âskaria) et en réclamant l'élargissement de l'ensemble des détenus politiques. Les avocats ont notamment insisté sur le moudjahid Lakhdar Bouregaâ, incarcéré le 30 juin. "Bouregaâ et les autres détenus doivent être immédiatement remis en liberté. Personne ne doit être jeté en prison pour avoir exprimé son opinion ou avoir porté un emblème à résonance identitaire", s'est indigné un avocat en regrettant que les magistrats aient "renié leur engagement à ne pas embastiller les manifestants du hirak". D'ailleurs, les robes noires n'ont pas manqué d'appeler les magistrats à rejoindre le mouvement pour une justice libre, affranchie des pressions et des manœuvres politiciennes. Très remontés contre l'ancien ministre de la Justice et proche des Bouteflika, Tayeb Louh, les avocats ont appelé à l'arrestation de celui qui est accusé d'avoir œuvré à garantir l'impunité du clan Bouteflika et à le conduire à la prison d'El-Harrach. "C'est lui qui, depuis son bureau de garde des Sceaux, veillait à la tranquillité du clan qui pouvait piller et voler en toute quiétude", a dénoncé un avocat. Dans une brève intervention prononcée sur le parvis de la cour de justice, un représentant du barreau d'Oran a réaffirmé le soutien au mouvement populaire pacifique et condamné la répression qui s'abat sur les manifestants depuis plusieurs semaines. Pour rappel, l'Union nationale des ordres des avocats a appelé, le 6 juillet dernier, à la suspension des activités judiciaires, ainsi qu'à l'organisation de marches régionales pour dénoncer les atteintes aux libertés (d'expression, de manifester et de circuler) et les arrestations des manifestants, et rappeler son attachement à la construction d'un Etat de droit fondé sur la souveraineté du peuple.