Ayant fait partie des pays de l'Union européenne, qui admettent difficilement que la Turquie en devienne membre, la France a, à nouveau, affiché son hostilité envers Ankara. La signature par le gouvernement Erdogan d'un protocole étendant un accord d'union douanière européen aux 10 nouveaux pays membres de l'UE, dont Chypre, sans reconnaître cet Etat, a provoqué une réaction française hostile à la position turque. “Il ne me paraît pas concevable qu'un processus quelconque de négociations puisse s'ouvrir avec un pays qui ne reconnaîtrait pas chacun des membres de l'Union européenne, c'est-à-dire les 25”, a déclaré le Premier ministre français, Dominique de Villepin, au sujet de la position de la Turquie. Cette sortie médiatique du Chef du gouvernement français n'a pas manqué de soulever l'ire des dirigeants turcs. Ainsi, une source proche du gouvernement d'Ankara a affirmé : “La Turquie n'acceptera jamais que la reconnaissance de l'administration grecque chypriote soit une précondition pour pouvoir entamer les négociations d'adhésion avec l'Union européenne, le 3 octobre.” La prise de position de Matignon demeure énigmatique dans la mesure où c'est la première fois qu'un Etat de l'Union européenne exige la reconnaissance de Chypre comme une condition à l'ouverture des négociations d'adhésion avec Ankara. Pis, Dominique de Villepin a été jusqu'à évoquer un report de l'ouverture des négociations. Pour rappel, plusieurs personnalités politiques de l'Hexagone, dont notamment l'ancien chef de l'Etat français et ex-président de la Commission européenne, Valéry Giscard d'Estaing, s'étaient ouvertement opposées à l'adhésion de la Turquie à l'UE. Ceci étant, Paris a été quasiment rabroué par Bruxelles, qui a estimé que la question chypriote devrait être réglée “dans le cadre des Nations unies”. En effet, la Commission européenne a répété, mardi, que la reconnaissance de Chypre par la Turquie n'était pas un préalable à l'ouverture des négociations d'adhésion, le 3 octobre, comme le soutient maintenant la France. Confortant cette option, le commissaire à l'élargissement, Olli Rehn, a estimé que la “voie était ouverte” à l'ouverture des négociations le 3 octobre, conformément aux conclusions du sommet européen de décembre 2004. Il est intervenu après la signature, vendredi dernier, par la Turquie du protocole étendant aux dix pays entrés dans l'UE en mai 2004 — dont la République de Chypre — un accord d'union douanière. “Dans le cadre de négociations que nous proposons, il est clairement dit que les progrès dans les négociations dépendront en particulier des progrès de la reconnaissance de Chypre dans le cadre de l'ONU”, a déclaré M. Altafaj, un porte-parole de la Commission européenne. Ankara sait désormais à quoi s'en tenir. K. ABDELKAMEL