Une minute de silence a été observée à la mémoire des nouveau-nés décédés la veille dans l'incendie de l'Hôpital mère-enfant d'El-Oued. Bravant l'interdit signifié par la dernière vague d'arrestations et d'intimidations subies par des manifestants dans plusieurs wilayas du pays, étudiants, enseignants et citoyens ont marché hier à Constantine pour le 31e mardi consécutif. La mobilisation de la communauté universitaire, qui ne fléchit pas au terme de son septième mois, emprunte désormais la voie du rejet de l'élection présidentielle du 12 décembre, de la médisance de leurs promoteurs dont le chef d'état-major de l'armée et de l'exigence de la libération des détenus d'opinion. D'ailleurs, tous les slogans, mots d'ordre et chants entonnés hier dans les rues de Constantine abondent dans ce sens et prédisent un échec cuisant et des répercussions dramatiques pour le pays si la perspective de la présidentielle est maintenue. Inébranlables donc, les étudiants de Constantine, qui renouent progressivement avec la ferveur et la grande mobilisation des premières marches, ont mis à jour leur répertoire de slogans qu'ils ont repris en chœur, notamment lors de haltes devant le siège de l'UGTA, la cour de justice et le tribunal. Néanmoins, fidèles à l'esprit de solidarité qui a marqué le hirak depuis ses débuts, les étudiants ont observé une minute de silence poignante à la mémoire des nouveau-nés décédés la veille dans l'incendie dramatique de l'Hôpital mère-enfant d'El-Oued. Un geste qui a surtout ému les passants par son élan de fraternité et de compassion, fortement applaudi d'ailleurs par certains. Revenant aux rituels de leur procession, les étudiants, rassemblés derrière une grande banderole sur laquelle on pouvait lire "Algérie libre et démocratique, justice sociale pour une université démocratique", ont scandé entre autres slogans : "Makanch l'vote, wallah ma ndirou, Bedoui wa Bensalah lazem itirou. W'idha b'errssas hebbitou ettirou, wallah mana habssine" (Pas de vote, nous ne le ferons pas, Bedoui et Bensalah doivent partir. Même si vous deviez nous tirer dessus, nous ne nous arrêterons pas), "Makanch l'vote, diroulna les menottes", "Makanch intikhabat mâa el-îssabat", "Makanch l'vote ya s'hab el-kaskrot" (Adeptes du casse-croûte, il n'y aura pas de vote), "Asmaâ ya l'Gaïd, dawla madania machi âaskaria" ou encore "Siada chaâbia, marhala intiqalia" (Souveraineté populaire, période transitoire), "Dawla madania, machi âaskaria" (Etat civil et non militaire). Devant le siège de l'UGTA, la cour de justice et le tribunal, ils ont surtout fulminé "Khlitou lebled ya sarrakine" (Vous avez pillé le pays, bande de voleurs), "Sahafa horra, adala mostakila" (Pour une presse libre et une justice indépendante), "Libérez khawetna'' (Libérez nos frères) et "Adala betilifoun" (Justice du téléphone). La marche a été aussi entrecoupée par des haltes où l'hymne national Kassaman a été entonné en chœur par tous les présents. Kamel Ghimouze