Devant la Cour d'Alger, au quartier des Ruisseaux, des dizaines de citoyens et des familles de détenus se sont mobilisés en solidarité avec 24 détenus arrêtés le vendredi 13 septembre et deux autres interpellés lors de la marche des étudiants du 17 septembre dont l'étudiante de 21 ans Dahmani Nour-Houda, Maâti Salah (47 ans, aliéné mental à 100%) et Billel Ziane, dont l'histoire a particulièrement bouleversé l'opinion publique. Il a été placé sous mandat de dépôt le 15 septembre, soit une semaine avant son rendez-vous en chimiothérapie. Le jeune homme est atteint d'un cancer à un stade avancé. Après examen des demandes de libération des trois détenus, la chambre d'accusation près la Cour d'Alger a statué favorablement sur le cas de Ziane et a substitué la détention préventive par un contrôle judiciaire. Elle a confirmé, en revanche, l'ordonnance portant détention préventive pour tous les autres. Des dizaines de citoyens et de militants politiques ont organisé, en outre, dans la matinée d'hier, un rassemblement devant le tribunal de Sidi-M'hamed, en soutien à Guerroudj Samir Idir et Timsi Nacer, emprisonnés au centre pénitentiaire d'El-Harrach pour port de l'emblème amazigh. Les deux ont été présentés devant les juges d'instruction pour une audition de fond. Hier, mercredi, était programmée également la comparution devant le juge d'instruction du coordinateur de l'Union démocratique et sociale (UDS, parti non agréé) arrêté jeudi dernier à son domicile à Douéra, quelques heures à peine après avoir bénéficié d'une ordonnance notifiant sa liberté provisoire en attendant son procès au tribunal de Koléa. Les manifestants brandissaient les portraits de Karim Tabbou, de Lakhdar Bouregâa, de Fodil Boumala, ainsi que ceux de manifestants. Des slogans, exigeant la libération des détenus politiques et d'opinion, fusent dans la ruelle longeant l'arrière-façade du tribunal d'Alger-Centre. Vers 10h30, le coup de gueule d'un citoyen capte l'attention des présents. "Je ne me calmerai pas. Je ne me tairai pas. Je n'ai pas peur de la prison. C'est un vol que vous venez de commettre", adresse-t-il aux policiers. L'un d'eux lui avait arraché des mains, quelques secondes auparavant, une pancarte sur laquelle il avait égratigné les enfants du vice-ministre de la Défense nationale. "Djazaïr hourra democratia" (Algérie libre et démocratique), lui font écho les manifestants. Ali Larskri, coordinateur de l'instance présidentielle du FFS, Mohcine Belabbas, président du RCD, et Youcef Ramdane Taâzibt, membre de la direction du Parti des travailleurs, arrivent presque en même temps. "Je suis venu soutenir Karim Tabbou, harcelé par la justice (…) Le vice-ministre de la Défense nationale s'acharne contre les jeunes qui manifestent depuis le 22 février et contre les acteurs politiques et les animateurs de la société civile. Il a squatté tous les centres du pouvoir et a instrumentalisé la justice", accuse Mohcine Belabbas. Selon lui, ce sont là des signes de panique devant la détermination du peuple à recouvrer sa souveraineté. "Nous apportons un soutien inconditionnel à Karim Tabbou et à tous les détenus politiques et d'opinion", certifie Ramdane Taâzibt, qui regrette "un recours abusif à la justice pour réprimer le mouvement populaire, en sus des rétrécissements des libertés de la presse, de l'expression et de manifestation". La mobilisation était également au rendez-vous à l'entrée du tribunal de Bab-El-Oued (situé à Baïnem, dans la proche banlieue est de la capitale) où comparaissaient d'autres codétenus du hirak. Aujourd'hui, les étudiants organiseront, à partir de 10h, un sit-in devant le tribunal de Sidi-M'hamed en protestation contre la détention abusive de près d'une centaine de manifestants et de personnalités politiques impliquées dans la révolution populaire.