22 citoyens, arrêtés vendredi à Alger, ont été placés, hier dimanche, sous mandat de dépôt par le juge d'instruction du tribunal de Sidi M'hamed. Karim Aimeur - Alger (Le Soir) - Pour la première fois depuis le début du mouvement populaire du 22 février, des manifestants sont poursuivis pour atteinte à l'ordre public et mis en prison. A l'annonce des premières décisions de placer sous mandat de dépôt les premières personnes, «les avocats ont décidé de boycotter la présentation des détenus devant le juge d'instruction car il s'agit d'un procès politique où la décision de les mettre tous sous mandat de dépôt a été déjà prise ailleurs», comme affirmé par le président de l'association RAJ, Abdelouahab Fersaoui. A l'extérieur du tribunal de Sidi M'hamed à Alger, des dizaines de citoyens, des responsables politiques et du mouvement associatif, ont organisé un rassemblement pour apporter leur soutien aux 22 manifestants interpellés vendredi et protester contre leur arrestation arbitraire. Les avocats des manifestants ont appris les chefs d'inculpation sur place : les militants islamistes sont poursuivis pour «incitation à la désobéissance» et «incitation à attroupement» et les autres personnes présentées devant le procureur le sont pour « incitation à attroupement via les réseaux sociaux » et « atteinte à l'ordre public ». Il s'agit particulièrement des militants du RCD et du RAJ. Les manifestants, sous l'œil vigilant des services de sécurité, ont exigé la libération de tous les détenus. «Libérez les otages, ils n'ont pas vendu la cocaïne», «Y a pas d'élections avec les bandes» et «Algérie libre et démocratique» ont été parmi les slogans entonnés par les manifestants. Ces derniers ont réclamé, en outre, la libération de Karim Tabbou et de Lakhdar Bouregaâ. Parmi les présents au sit-in, on cite le président du RCD, Mohcine Belabbas, et plusieurs cadres de son parti, Ramtane Taâzibt, député démissionnaire du PT, des militants du FFS, le président du RAJ, Abdelouahab Fersaoui, et le vice-président de la LADDH, Saïd Salhi. Mais la décision de placer les manifestants sous mandat de dépôt a provoqué l'incompréhension et la consternation, d'autant plus que c'est la première fois depuis le lancement du mouvement populaire qu'un tel acte se produit. «Désormais, la justice aux ordres continue dans la prise d'otage d'Algériens innocents et participe indignement au discrédit des institutions et à l'escalade dans la logique répressive d'un pouvoir aux abois», a dénoncé le chargé de communication du RCD, Atmane Mazouz. «Finalement, le pouvoir est décidé de faire passer ses élections par la force et la contrainte. Il a fait le choix du pire au risque d'exacerber les tensions et d'attenter à la cohésion et la stabilité nationale. Ces élections sont dangereuses, comme celles déjà prévues le 18 avril et le 4 juillet 2019 et rejetées par le peuple», a réagi, pour sa part, le vice-président de la LADDH, Saïd Salhi, appelant au respect des libertés démocratiques et de la volonté du peuple pour le changement. Dans des déclarations à la presse, Ramtane Taâzibt a affirmé que ces actes du pouvoir (emprisonnement des manifestants) vont renforcer la Révolution. Accusant le pouvoir de «piétiner la Constitution quand il veut», l'orateur a rappelé que la liberté d'expression et d'opinion est consacrée par toutes les conventions internationales ratifiées par l'Algérie. K. A.