À ce rythme, la barre des 40 milliards de dollars des recettes hydrocarbures sera dépassée et l'excédent en termes de rentrées fiscales supplémentaires avoisine le milliard de dollars mensuellement. Mékidèche, expert pétrolier : "Le brut continuera à être cher à court et à moyen terme. L'Algérie devra tirer profit de cette manne pour donner un espoir aux jeunes de trouver un emploi durable." Les caisses de l'Etat n'ont jamais été aussi pleines. Les prix du pétrole ont atteint vendredi dernier un nouveau record : 65 dollars à Londres, la référence pour le pétrole algérien. La question sur les marchés internationaux est de savoir à quel niveau de progression les cours vont-ils culminer ? En Algérie, on assiste à une pluie de dollars du fait de cette situation exceptionnelle. En effet, les réserves en devises du pays grimpent vers le chiffre de 50 milliards de dollars. Ce qui est nouveau, c'est que les rentrées fiscales supplémentaires sont en train d'exploser. Chaque mois, plus de 1 milliard de dollars, soit environ 80 milliards de dinars, vient s'accumuler dans le fonds de régulation qui avait atteint à juin 900 milliards de dinars, soit 12 milliards de dollars. En effet, sur une augmentation d'un dollar du prix du baril, l'Algérie gagne 600 millions de dollars par an. Sur la base d'un dollar à 70 dinars, le surplus est estimé à 38 milliards de dinars en termes de rentrée fiscale supplémentaire par dollar supplémentaire, au-delà de l'équilibre budgétaire réalisé grâce à un baril à 30 dollars. Cette réserve est destinée à faire face au déficit budgétaire et à un éventuel retournement du marché pétrolier, est à ce rythme sur le point d'atteindre environ 18 milliards de dollars à fin décembre, estime-t-on. En résumé, jamais les caisses de l'état n'ont été aussi pleines. Cette embellie financière exceptionnelle permet de financer le gros du plan de relance économique d'un coût de 55 milliards de dollars qui prévoit, entre autres, la construction de 1 million de logements et la création de 2 millions d'emplois d'ici à 2009 même si les prix du pétrole descendent à 19 dollars. Ce scénario baissier semble peu probable à court et moyen terme, eu égard aux tendances actuelles du marché international du pétrole qui poussent au maintien de la flambée des prix du pétrole. La barre des 40 milliards de dollars dépassée Il convient d'ajouter qu'à ce rythme, la barre des 40 milliards de dollars sera dépassée. D'autant que le dernier trimestre correspond à une forte demande internationale sur le pétrole du fait de la reconstitution traditionnelle des stocks à la veille de l'hiver. L'Algérie bénéficie du reste du décalage gazier qui fait que les prix des exportations de gaz seront plus chers le second semestre par rapport au premier semestre. Les recettes hydrocarbures avaient atteint à fin juin 20 milliards de dollars. Elles seront supérieures à ce niveau le dernier semestre de l'année en cours. Mais que gagne le citoyen dans cette affaire ? La majorité répond : "Je n'ai pas vu ma situation changer, que les prix du pétrole soient si hauts ou à des niveaux bien plus bas". En fait, cette réplique si simple montre que cette aisance financière ne s'est pas traduite par une nette amélioration de la situation de la population. La question qui se pose de nouveau : que va faire le chef de l'état de toute cette manne ? Le discours officiel dit qu'il va servir à financer le plan de relance qui vise à combler le retard en matière d'infrastructures, améliorer les conditions de vie de la population, lutter contre la pauvreté. Le véritable problème est que 1 dinar dépensé ne rapporte pas autant que dans les autres pays au même niveau de développement que l'Algérie. Ce qui renvoie à ce mal algérien, l'inefficacité dans les dépenses publiques. Il y a du gaspillage reflété dans les retards dans les projets. La corruption, la fuite des capitaux privent la population des bienfaits de cet effort de développement. Dans un pays où on pense dépenses avant recettes. Enfin, quitte à le répéter, la présente situation constitue une chance unique de sortir l'Algérie du cercle de la pauvreté et l'Algérien de la misère. Encore faut-il que nos gouvernants, tirant les leçons du passé, parviennent à mettre en œuvre de façon efficace ce plan Marshall. Cela va de la lutte contre la corruption, l'assainissement des sphères décisionnelles à l'implication des compétences locales. À travers ces chantiers, se profilera l'indice de la volonté de changement au sommet de l'état. Ou d'un nouveau coup d'épée dans l'eau. N. Ryad