Selon plusieurs témoignages recueillis par les ONG, des migrants préfèrent mourir en pleine mer que de rester sur le sol libyen, où la situation sécuritaire ne cesse de se dégrader. Le nombre de tentatives d'immigration clandestine vers l'Europe, en partance de Libye, est toujours en hausse, malgré les mauvaises conditions climatiques qui se sont installées depuis plusieurs jours, a alerté de nouveau l'ONG SOS Méditerranée dans un communiqué rendu public dimanche soir. "Plus de 700 personnes auraient tenté de fuir la Libye sur de fragiles embarcations cette semaine, tandis que de nouvelles violences meurtrières faisaient rage autour de Tripoli", affirme l'ONG, précisant que "sur les 215 personnes secourues par l'Ocean Viking lors de trois opérations de sauvetage, près d'un tiers étaient des enfants de moins de 18 ans, dont la grande majorité voyageaient seuls". Ce bilan est loin d'être exhaustif et ne concerne que les traversées en Méditerranée centrale qui n'incluent pas évidemment les départs de barques depuis la Tunisie, en nette augmentation ces derniers mois. Cela met l'Union européenne devant ses responsabilités, estime l'ONG qui éprouve de plus en plus des difficultés à travailler en Méditerranée et de débarquer sur le sol européen les migrants et réfugiés secourus. "La catastrophe humanitaire en cours en Libye et en Méditerranée incarne l'incapacité des Etats de l'UE à agir conformément aux principes et obligations humanitaires du droit international", affirme Michael Fark, chef de mission recherche et sauvetage pour MSF à bord de l'Ocean Viking. "Rien que ces derniers jours, au moins 440 personnes ont été interceptées par les garde-côtes libyens, qui sont financés par l'UE, et ont été renvoyées de force vers les conditions de violence et d'exploitation qui sont connues par l'UE", a-t-il ajouté, rappelant que "pendant ce temps, les corps de ceux qui n'ont pas pu être trouvés échouaient sur le rivage. Alors même que l'Ocean Viking attendait des instructions pour son débarquement, des rapports annonçaient un autre naufrage tragique au large de Lampedusa". L'Union européenne a décidé en effet d'adopter une politique répressive dans le traitement de ce dossier, ce que dénoncent les ONG mais aussi l'ONU dans leurs rapports périodiques. "Ce sont là les effets dévastateurs de leurs politiques que les dirigeants européens ne peuvent plus ignorer", rappellent MSF et SOS Méditerranée. Vendredi, l'ONU a évoqué une "recrudescence" des départs de migrants depuis la Libye, où le conflit armé opposant les autorités légitimes de Tripoli aux soldats loyaux autorités parallèles de l'Est, dirigés par le général à la retraite Khalifa Haftar, ont aggravé la situation. Dans un communiqué, l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) a exprimé son inquiétude face "aux derniers développements en Libye où, en l'espace de 48 heures, au moins neuf bateaux transportant plus de 600 migrants ont été découverts sur la route méditerranéenne centrale". Un dixième bateau est arrivé par "ses propres moyens" le 21 à Lampedusa en Italie avec 74 personnes à son bord, a-t-elle précisé. "Cette recrudescence apparente des départs de Libye survient à un moment où la capitale, Tripoli, et les régions avoisinantes sont témoins de certains des bombardements les plus violents depuis le début du conflit en avril", a relevé l'OIM.