C'est une mobilisation des plus exceptionnelles pour un jour ordinaire de la semaine qu'a connue la ville de Tizi Ouzou, hier, à l'occasion de cette date historique du 11 Décembre que les manifestants considérait comme doublement cruciale tant elle marquait le dernier jour avant l'élection présidentielle que le peuple ne cesse de rejeter depuis son annonce et aussi la célébration du 11 Décembre 1960, cette date à forte charge symbolique que le peuple a tenu à récupérer, à l'instar du 1er Novembre et du 5 Juillet, dans le cadre de sa démarche de réappropriation des dates historiques. Ils étaient des milliers au départ de la marche à l'entrée du campus Hasnaoua de l'université Mouloud-Mammeri et des dizaines de milliers à leur arrivée à la place de L'Olivier, à l'autre bout de la ville. Tout au long de cet itinéraire, des milliers de personnes venaient grossir les rangs des marcheurs. Certains groupes sont même venus carrément en sens inverse de la marche pour se fondre dans la marée humaine qui ne cessait de prendre de l'ampleur, donnant ainsi, une fois arrivée au centre-ville, la nette impression qu'il s'agissait d'une marche de vendredi. À vrai dire, les indices de cette grandiose mobilisation enregistrée hier étaient perceptibles déjà la veille tant plusieurs appels à la marche ont été lancés par l'Ordre des architectes, les syndicats autonomes, les enseignants de l'université et des collectifs de citoyens. Des appels qui se rejoignaient tous dans leur mot d'ordre qui n'est autre que le rejet du scrutin d'aujourd'hui et la revendication d'un changement radical du système à travers une transition démocratique. Ce qu'allait être cette mobilisation s'est ensuite confirmée durant les premières heures de la matinée puisqu'il n'était pas encore 9h lorsque des manifestants drapés dans le drapeau national et l'étendard amazigh commençaient à affluer vers le lieu de départ de la marche. Cependant, d'autres groupes commençaient à se former tout au long de l'itinéraire attendant l'arrivée du flot principal en provenance de l'université. À 11h, la foule qui s'est ébranlée de l'université rejoint celle déjà formée par les syndicats autonomes, les architectes et autre professionnels de la construction sur l'esplanade du stade du 1er-Novembre, alors qu'une marée humaine arrivait en sens inverse en provenance de l'esplanade de l'ex-mairie du centre-ville. Tous ensemble scandaient, entre autres, "Ulac l'vot ulac", "Istiklal", "Azekka ulac l'vot" et "Hna ouled Amirouche, marche arrière ma nwelouch djaybin el-houriya". Sur de nombreuses banderoles, on pouvait également lire : "La révolution du 22 février : la dernière chance pour l'Algérie de s'en sortir", "Makach intikhabate mâa el-îssabate", "Ce qui a changé entre le 11 Décembre 1960 et le 11 décembre 2019, c'est la forme de colonisation", "Que peut faire un président mal élu, sinon mal gérer", "Système dégage, laissez-nous construire notre Algérie", "Le hirak est un devoir national, traître est celui qui votera" et encore : "Les syndicats autonomes rééditent l'histoire : 11 Décembre 1960 – 11 décembre 2019". Comme à l'accoutumée, des centaines de portraits de détenus étaient également brandis par les manifestants qui réclament toujours leur libération.