C'est une foule toujours aussi impressionnante que déterminée qui a déferlé, encore hier, sur la ville de Tizi Ouzou pour prendre part à la 49e marche du vendredi pour clamer à l'unisson son rejet catégorique et irréversible de toute initiative venant du pouvoir "illégitime" de Tebboune, et réclamer comme un seul homme une transition démocratique comme unique clef d'un nouvel ordre politique fondé sur la démocratie et la justice sociale. Comme de tradition depuis maintenant bientôt une année, il aura fallu moins d'une demi-heure pour que le visage du centre-ville de Tizi Ouzou change radicalement. Il n'était pas encore tout à fait 14h lorsque, sur l'itinéraire de la marche qui était désespérément désert durant la matinée, il fallait à nouveau jouer des coudes pour pouvoir avancer. Une impressionnante marée humaine comme tombée du ciel l'a envahi comme chaque vendredi à la même heure. Des dizaines de milliers d'hommes, de femmes, en groupe, en famille ou encore seuls sont venus, avec la même endurance et les cordes vocales toujours bien huilées, crier tous ensemble à la face d'un pouvoir qui fait toujours le sourd, que seul le départ de tout le système peut les faire rentrer chez eux. Bien que ce 49e acte de la révolution populaire ait été dédié au chanteur et chantre de l'amazighité et de la démocratie, Matoub Lounès, dont la mémoire a été, à l'occasion du 64e anniversaire de sa naissance, très fortement présente, à travers ses portraits, ses chansons, ses expressions et des messages réclamant la vérité sur son assassinat, les manifestants n'ont pas perdu de vue les principaux objectifs de la révolution. "Le hirak s'engage à parachever la Révolution de 54 et libérer complètement l'Algérie qui demeure fidèle en cela aux Abane, Boudiaf, Ben M'hidi, Aït Ahmed… ces grands hommes dont le souvenir et les idées vivront toujours" lit-on sur une large pancarte brandie par un manifestant qui a résumé ainsi clairement la nature de la république réclamée par le peuple. "Le hirak est là pour sonner le glas de la maffia", "On ne rentrera chez nous qu'après avoir recouvré notre liberté", "Oui pour une transition démocratique et non à l'alternance clanique", "On ne peut laisser indéfiniment le gouvernail entre les mains de ceux qui ont fait chavirer le pays pendant 58 ans", "Nous continuerons à marcher jusqu'à expulser tous les squatteurs de la république", "Matoub est mort mais son combat est définitivement repris par le peuple qui ira jusqu'au bout" , lit-on sur quelques-unes des nombreuses pancartes brandies par les manifestants pour réaffirmer leur détermination à poursuivre ce combat libérateur quel que soit le temps que cela prendra. Sur d'autres pancartes, les manifestants qui exprimaient leur rejet de toute exploitation du gaz de schiste, s'en sont pris de manière virulente aux médias du pouvoir comme sur une des pancartes sur laquelle on pouvait lire "Halte au trabendo médiatique", et ont appelé à consolider davantage le front populaire contre le pouvoir. Tout au long de l'itinéraire de la marche, les manifestants ont scandé également des slogans dénonçant Tebboune, d'autres réclamant un Etat civil, et d'autres encore exigeant la libération des détenus d'opinion.