Si des détenus et des manifestants arrêtés ont été relaxés, la campagne de répression du mouvement populaire n'a pas cessé. Les arrestations et les présentations devant la justice se poursuivent "normalement". Les hirakistes de l'Ouest algérien ont vécu une semaine bien particulière, la semaine passée, avec des fortunes diverses pour les uns et les autres. Cela a commencé vendredi 28 janvier avec une énième interpellation de l'ancien policier, Toufik Hassani, pour avoir pris part à la marche de solidarité avec les citoyens de Saïda, interdits de s'exprimer depuis plusieurs mois. Parti mettre fin au blocus en compagnie de hirakistes venant de plusieurs wilayas — comme cela avait été le cas pour Sidi Bel-Abbès et Mascara —, Hassani s'est retrouvé dans les locaux d'un commissariat où il a passé deux nuits avant d'être présenté devant le tribunal pour répondre des chefs d'accusation, désormais propres aux hirakistes, d'attroupement non armé et incitation à attroupement. Celui qui a gagné le respect des Algériens pour avoir dénoncé la répression policière contre les étudiants d'Alger, a été condamné à deux mois de prison avec sursis par la justice de Saïda. Deux jours plus tard, soit le mardi 3 mars, il sera néanmoins interpellé près de chez lui, à Chlef, et présenté le lendemain devant le magistrat instructeur du tribunal de Ténès pour répondre à l'accusation d'incitation à attroupement. Cette fois-ci, Hassani observe une grève de la faim pour dénoncer cet acharnement caractérisé. Le 4 mars, le magistrat instructeur décide de le placer sous contrôle judiciaire et l'ancien policier retrouve la liberté. Si Toufik Hassani continue de payer le tribut de son attachement à la révolution du 22 février, des hirakistes d'Oran accueillent avec bonheur la relaxe accordée le 3 mars à Kaddour Chouicha, qui avait été incarcéré pendant 28 jours avant d'être libéré pour des impératifs de santé. Le défenseur des droits humains qui avait été condamné à une année de prison le 10 décembre 2019, Journée internationale des droits de l'Homme, a été finalement disculpé de toutes les charges en appel, de même que le jeune Affif Abderrahmane, accusé d'atteinte à l'intégrité territoriale pour avoir arboré l'étendard berbère huit mois plus tôt, qui a été relaxé par le tribunal correctionnel de Cité Djamel. Il lui a, également, été restitué"l'emblème corps du délit". Ces deux décisions ont été très bien accueillies à la fois par les hirakistes et par les avocats de la défense qui croient y voir une évolution rassurante de la justice en Algérie. Pourtant, et alors même que les Oranais fêtaient les avocats qui défendent les dossiers du hirak, Ibrahim Daouadji, l'icône du mouvement de Mostaganem, libéré après plusieurs mois de détention, était interpellé à Alger par des gendarmes en civil qui ne le relâcheront qu'en fin de soirée. Une nouvelle qui n'a pas manqué d'inquiéter sur la persistance des services de sécurité à continuer de restreindre les libertés des Algériens, notamment des opposants au pouvoir. D'autant que la veille, lundi 2 mars, la Cour d'appel de Mostaganem avait condamné 17 hirakistes à deux mois de prison ferme pour avoir manifesté leur rejet de l'élection présidentielle du 12 décembre. Le 4 mars, dans la wilaya de l'Emir Abdelkader, la figure emblématique du hirak de Mascara, Hadj Ghermoul, a comparu dans le cadre de son appel contre les 18 mois de prison ferme qu'il avait écopés en première instance, en décembre 2019, pour diffusion de vidéos "portant atteinte à l'intérêt national". Le procès, pour lequel des avocats d'Oran et d'ailleurs se sont déplacés, a été finalement reporté au 11 mars. Les problèmes du hirakiste n'étaient pas pour autant résolus car, en rentrant chez lui, il a trouvé une convocation l'invitant à se rendre au tribunal de Mascara, le lendemain. Jeudi matin, il a été entendu avant d'être relaxé par le juge d'instruction, ce qui, avec la relaxe prononcée le même jour en faveur de 23 hirakistes de Mostaganem, apporte une note de satisfaction à une semaine mouvementée pour le hirak de l'Ouest.