Les accusés comparaissaient en citation directe pour incitation à attroupement et entrave à la tenue de la présidentielle du 12 décembre dernier. Vingt-trois hirakistes, dont des femmes, un avocat et ses enfants, ont été jugés jeudi dernier par le tribunal correctionnel de Mostaganem pour attroupement non armé, incitation à attroupement, mais aussi pour entrave au déroulement normal des opérations électorales, tel que prévu par la loi organique relative à l'autorité nationale indépendante des élections. Le procureur de la République a requis la peine de six mois de prison contre des accusés qui comparaissaient libres. Il faut rappeler que les événements qui ont conduit les 23 accusés devant la justice remontent au 12 décembre 2019, jour de la tenue de l'élection présidentielle. On se rappelle que des mesures sécuritaires très strictes avaient été prises sur l'ensemble du territoire national, notamment les grandes wilayas, pour assurer le bon déroulement des opérations électorales et empêcher les opposants à manifester leur rejet. Parmi ces mesures, des interpellations, souvent aveugles, avaient été effectuées par les services de la police, qui arrêtaient toute personne suspectée de perturber le scrutin. À Mostaganem, 23 personnes ont été mises aux arrêts ce jour-là, dont des hirakistes, en différents lieux du centre-ville, y compris là où il n'y avait pas de centres de vote. Parmi les suspects, Me Zahaf, connu pour défendre les hirakistes, et ses enfants qui se trouvaient au mauvais endroit, au mauvais moment. Devant le tribunal correctionnel, tous ont rejeté les accusations portées à leur encontre même si les hirakistes n'ont pas nié leur appartenance au hirak. "Jamais nous n'avons tenté de perturber les élections, ni incité à un quelconque attroupement", ont-ils affirmé en substance. Les avocats de la défense — une quinzaine, comme pour tous les procès de hirakistes — ont naturellement plaidé l'innocence de leurs mandants et réclamé leur relaxe. Une nouvelle fois, l'aspect politique a lourdement pesé sur les différentes interventions. "Nous sommes devant un dossier politique, et toutes ces personnes ont été arbitrairement interpellées pour une seule raison : faire passer l'élection du 12 décembre", a dénoncé Me Fatima-Zohra Meziane, avocate du barreau d'Oran, qui court les tribunaux pour défendre le droit de manifester et d'exprimer ses opinions, garanti par la Constitution algérienne. "Nous ne sommes pas encore dans un Etat de droit, et si nous voulons y arriver un jour, il faudra commencer par libérer ces innocents", a-t-elle déclaré. D'autres avocats ont déploré que le parquet accepte de traiter ce genre de dossiers qui ne devraient pas aller au-delà d'un poste de police. "Les magistrats devraient avoir le courage de renvoyer ce type de dossiers qui ne sont pas basés sur des éléments de preuves probants", déclarera Me Ahmed Mebrek, tandis qu'un troisième avocat exhortera le tribunal à ne pas permettre que "la justice soit instrumentalisée de la sorte à des fins politiques". Le verdict devrait être prononcé le 5 mars.