Les Algérois étaient, hier, au rendez-vous. Des centaines de citoyens ont, une nouvelle fois, répondu présent à la marche populaire hebdomadaire. Les avertissements des services du ministère de la Santé et des autorités quant aux risques de propagation du coronavirus n'ont pas eu d'effet sur les marcheurs. Ils étaient plus nombreux que les semaines précédentes à battre le pavé pour réitérer la revendication principale du hirak : "Pour un Etat civil et non militaire." En dehors de quelques manifestants qui ont porté le masque de protection et de quelques-uns qui ont évité de se saluer directement et de l'apparition des flacons de solution hydroalcoolique, peu de mesures de prévention ont été visibles parmi les manifestants. Certains manifestants ont même minimisé les risques. Beaucoup estiment même que c'est un stratagème trouvé par les autorités pour freiner l'élan de la mobilisation populaire. En revanche, la plupart des policiers chargés d'encadrer les manifestations étaient munis de masques de protection. Au-delà de l'intrusion du coronavirus dans la marche, les slogans des manifestants restent les mêmes. Les centaines de marcheurs ont scandé à tue-tête des slogans appelant à l'instauration d'un Etat civil et non militaire. Puis, l'arrivée, toujours aussi spectaculaire que festive, des marcheurs de Bab El-Oued a donné une autre ambiance à la manifestation. "Karim Tabbou daweh el-Antar" (Karim Tabbou a été conduit à la caserne Antar), ou encore "Winek, winek ya âadala, Karim Tabbou dayer hala" (Où es-tu ô justice, Karim Tabbou a fait des siennes !) ont brisé le silence de la capitale. Le procès de la semaine passée de l'homme politique a visiblement marqué les esprits. Puisqu'en plus d'avoir crié son nom à plusieurs reprises, le portrait du coordinateur national de l'UDS a été porté par plusieurs manifestants. C'était aussi le cas d'autres détenus d'opinion qui ne sont toujours pas élargis. Pour donner la réplique au gouvernement qui a commencé à réprimer les manifestations depuis la semaine dernière, des groupes de marcheurs ont "dédié" une chanson à la police. "Ya lpoulis hebbes marche arrière, barka ma tahger fe zawaliyya, haltek kima halti !" (Ô policier, arrête de faire marche arrière, cesse de réprimer les pauvres, parce que ta situation est identique à la mienne !), entonnent des voix de jeunes venus de Bab El-Oued avant d'être stoppés dans leur élan à hauteur du siège du RCD, rue Didouche-Mourad. C'était également l'occasion de rappeler leur solidarité au policier Toufik Hassani, mis en détention à Chlef pour avoir participé au hirak.