Alors que les organisations nationales et internationales des droits de l'Homme, des partis politiques, des avocats et autres citoyens ont dénoncé un procès inéquitable dans l'affaire Karim Tabbou, le Conseil national des droits de l'Homme se range du côté des autorités. Sans s'appuyer sur une enquête indépendante qu'il aurait dû réclamer, le CNDH a rendu public un communiqué pour voler au secours du parquet dont il prend la seule version. Il affirme, en effet, que Karim Tabbou "a subi des examens médicaux effectués en premier lieu par le médecin de l'infirmerie de la Cour, puis par un groupe de spécialistes qui ont été chargés par la direction générale de l'administration pénitentiaire et de la réinsertion". Il en conclut, donc, que ces spécialistes ont "unanimement affirmé que l'intéressé ne souffre d'aucune maladie pouvant entraver sa comparution au procès, notamment les symptômes d'un accident vasculaire cérébral (AVC)". Le communiqué du professeur Bouzid Lazhari n'a même pas fait cas de l'aveu du parquet lui-même qui a avoué, dans un premier communiqué, que l'homme politique était victime d'un malaise au sein même de la juridiction avant d'être transféré à l'infirmerie. Au reproche de la défense et de la famille de Karim Tabbou qui s'offusquent du fait que le détenu soit présenté devant la Cour sans que ses avocats n'en soient informés, le CNDH préfère encore une fois donner raison au parquet. Il estime que seule cette juridiction a le droit de reporter ou non un procès. Il rappelle que l'accusé et son avocat (qui n'étaient même pas informés de la tenue du procès) "ont le plein droit au pourvoi en cassation contre les arrêts de la Cour d'Alger" et que "les pourvois en cassation ne peuvent être fondés que sur l'une des causes suivantes : excès de pouvoir, violation des formes substantielles de procéder, défaut ou insuffisance de motifs, ou manque de base légale". C'est pourtant cet excès de pouvoir que dénoncent aujourd'hui les avocats de Karim Tabbou et plusieurs barreaux du pays qui estiment que le coordinateur de l'UDS n'a pas "eu droit à un procès équitable". Plus que cela, beaucoup d'avocats estiment que le procès "n'a même pas eu lieu". Ce n'est pas la première fois que le CNDH, organisme censé alerter les autorités sur les violations des droits de l'Homme, s'est érigé en avocat du pouvoir. Son président, Bouzid Lazhari, nommé à ce poste après avoir servi dans la commission de dialogue de Karim Younès, était monté au créneau en décembre dernier contre la volonté de certains députés du Parlement européen qui voulaient faire voter une motion demandant à l'Algérie de libérer les détenus d'opinion. Au lieu de s'inquiéter de la situation des détenus et des arrestations arbitraires de certains militants politiques, l'ancien conseiller juridique de Liamine Zeroual a préféré louer l'Etat de droit qui prévalait en Algérie. Pis, comme les hommes du pouvoir, il a préféré jouer sur la corde sensible de l'ingérence étrangère dans "les affaires internes" comme seule réponse aux critiques venant de l'étranger. Son rôle de "défenseur des droits" n'est valable que dans les textes.