Comme chaque dimanche, des femmes des localités d'Aïn El Hammam, d'Abi Youcef, d'Ath Yenni, et surtout celles d'Ath Menguellet se rendent au marché du lieudit “Ahechad Bwuqouir”, un carrefour situé à quelques encablures de la ville et à une cinquantaine de mètres de l'hôpital de Aïn El Hammam (ex-Michelet). Des femmes, tous âges confondus, y viennent étaler, vendre ou acheter des marchandises, vêtements, linge, bijoux… “Le souk du dimanche, ou le "dimanche des femmes", existe depuis le début du XIXe siècle”, selon na Tamazuzt, une septuagénaire de Beni Yenni. Cependant, loin de rivaliser avec le grand marché hebdomadaire du mardi (“Tslatha n'Michelet”), animé en majorité par la gent masculine, le marché du dimanche demeure d'un intérêt non seulement commercial, mais surtout d'ordre social. “Aujourd'hui, nous souhaitons que les autorités se penchent un peu sur nos conditions de vie et s'intéressent à celles qui restent cloîtrées à la maison pour faire connaître leurs produits (robes, broderies, tissages…) envoyés au marché, au lieu de mener parfois un conflit "sexiste"”, dira une dame quinquagénaire. En effet, le carrefour d'Ahechad est un lieu de rencontre, une aubaine pour celles qui cherchent à nouer contact. “Il y a parmi ces femmes des mères de famille venant d'Ath Yahia ou d'Ath Yenni (15 à 20 km) de trajet à parcourir pour commercialiser un produit ou tisser des liens qui, pourquoi pas, finiront par éventuellement une union conjugale”, nous confie notre interlocutrice. D'aucuns pensent que ces créatures, qui ont sans doute vécu des moments difficiles à travers l'histoire et la loi des hommes, ont bel et bien le droit d'exister à leur manière sans rivalité, car désormais elles aussi auront le mérite de contribuer positivement à la dynamique économique et socioculturelle. Elles avaient déjà été derrière leur métier à tisser pour subvenir aux besoins de leurs familles à Ath Hichem, comme elles sont derrière chaque artisan bijoutier à Ath Yenni ou ailleurs. Par ailleurs, le marché du dimanche — une exception qui ne fait pas la règle — profitant remarquablement aux visiteurs de l'hôpital pour survivre à la concurrence déloyale, a failli arrêter de fonctionner. Il aurait même été condamné à disparaître pendant les 3 années noires de 2001 à 2003, n'étaient la bonne volonté et la ténacité de ces femmes courageuses qui ont vite repris l'activité. Le carrefour d'Ahechad survivra-t-il à toutes les vicissitudes du temps ? Evidemment, tant qu'il y aura des femmes ! Limara B.